Législation

Nouveau décret : réaction et explication de l'Association des Optométristes de France (AOF)

Nouveau décret : réaction et explication de l'Association des Optométristes de France (AOF)

Yannick Dyant, président de l'AOF

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Yannick Dyant, président de l'AOF (l'Association des Optométristes de France) a répondu à nos questions sur les règles générales d’exercice de la profession d’opticien-lunetier.

Acuité : Quelle est votre première réaction suite à la publication du décret ?

Yannick Dyant : Tout d’abord, l’AOF n’a pas fait parti des réunions de travail pour ce décret. Alors que nous pouvions espérer une vraie (r)évolution en termes de responsabilité de l’opticien, nous avons ici un texte qui, d’une part, étend la durée de validité de l'ordonnance, mais surtout, introduit bien d'autres limitations. De manière générale, ce décret prolonge simplement les changements mis en place en 2007. Dès lors, il est difficile de se réjouir pleinement : les besoins de la population augmentent, et l'offre en ophtalmologie continue de diminuer. L’accès aux soins mérite une réforme de la filière visuelle beaucoup plus profonde.

A. Ce décret est-il une avancée pour la profession ? Si oui, en quoi ?

Y.D : Il n’est à notre avis ni une avancée ni une régression. Malheureusement, l’opticien de santé tant mis en avant, n’est pas encore pour aujourd’hui.

  • L’allongement de la validité de l’ordonnance est une petite avancée, l'opticien est conforté dans ses compétences en réfraction. Cette mesure pose des problèmes quant à la qualité du dépistage des pathologies. Seule une évolution des formations permettra de corriger ce point.
  • Nous retrouvons le droit de délivrer un équipement d’optique sans prescription mais de manière bien plus encadrée.
  • L’interdiction de modifier une prescription pour une primo délivrance nous surprend tout particulièrement. Si l’opticien est responsable du produit qu’il délivre, il devrait être en mesure d’assumer pleinement la qualité du produit.
  • Le rôle de l’ophtalmologiste est de s’assurer de la santé oculaire du patient. L’obligation d’ordonnance leur donne cette possibilité, cela ne passe aucunement par la prescription exacte de la réfraction. Les cabinets d'ophtalmologistes vont donc s'encombrer de la gestion des « erreurs ophtalmologistes », qui étaient jusque-là bien souvent pris en charge directement par l'opticien. Les clients, quant à eux, vont devoir faire des aller-retours fastidieux entre opticien et ophtalmologiste.
  •  L’obligation de communiquer avec l’ophtalmologiste est un élément positif, si la profession arrive à le mettre en place. Cela permettra de créer des liens professionnels et non de simples visites de courtoisie sans grand intérêt pour les ophtalmologues.
  • Concernant les lentilles de contact, avoir besoin d’une prescription médicale pour avoir le droit d’expliquer la pose et le retrait des lentilles de contact est un déni complet de la pratique actuelle. Sur le terrain, parmi les 1000 ophtalmologistes membres du SFOALC (Société Française des Ophtalmologistes Adaptateurs de Lentilles de Contact), seul quelques centaines sont réellement impliqués en contactologie, ce qui constitue un maillage très insuffisant pour couvrir la demande de santé publique. De très nombreux ophtalmologistes travaillent en partenariat avec les opticiens et optométristes locaux formés en contactologie.

A. Comment vos adhérents vont-ils mettre en pratique ces mesures ? Où cette fois, les opticiens vont-ils s'approprier ces mesures ?

Y.D : Nos adhérents, comme ils l’ont toujours fait, appliqueront la législation, dans ce sens nous fournirons à nos adhérents dans un premier lieu un guide de bonne pratique. Nous espérons que l’ensemble des opticiens utiliseront pleinement les possibilités pour faire valoir leurs connaissances et compétences.

A. Qu'avez-vous demandé comme mesures supplémentaires qui n'ont pas été retenues ?

Y.D : L'AOF a été consultée à plusieurs reprises en amont de la loi santé, dans le cadre de la mission IGAS et du rapport rédigé par Mme Voynet, nous avons également défendu de nombreux amendements au Sénat et à l'Assemblée nationale lors des discussions. A notre grand regret, l’AOF n’a pas été consultée lors de la rédaction des décrets. Comme vous pouvez vous en douter, nous aurions porté un certain nombre d’évolutions.

A. Pour la délivrance de lunettes sans ordonnances, comment est évaluée la situation en « en cas d'urgence constatée et sans solution médicale adaptée » ? Le client sera-t-il remboursé de son équipement ? 

Y.D : Faut-il rappeler qu'avant la loi de sur la consommation, portée par Benoit Hamon en 2014, l'opticien était libre de proposer un équipement optique sans ordonnance ? Nous retrouvons donc du bon sens, lors de la délivrance d’équipement sans prescription médicale, avec un opticien prenant ses responsabilités. Les équipements réalisés dans ce cadre ne donneront certainement pas lieu à un remboursement.

A. Ce nouveau décret va-t-il désengorger les cabinets ?

Y.D : Tout comme la réforme de 2006 et le décret de 2007, nous pensons que ces changements n’auront qu’un impact limité sur les délais d’attente, et ce pour plusieurs raisons. Un parcours de soins qui se complexifie pour les patients, une population vieillissante qui profitera peu de ces évolutions et un droit d’information très encadré.

A. La profession peut-elle faire connaître au grand public ces nouvelles prérogatives ? Comment l'opticien peut-il le faire savoir ?

Y.D : Le droit de communiqué sur la réfraction en magasin ne changera que peu la situation actuelle, c’est malgré tout une évolution positive, les patients/clients ne devraient pas avoir de difficulté à accéder à ce type d’information. Nous encourageons donc tous les opticiens à communiquer sur leur compétence et à valoriser leur rôle de professionnel de santé.

Une communication sur les différentes évolutions législatives en direction de la population devrait être encouragée et soutenue par les pouvoirs publics.

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Écrit par la Rédaction
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2 commentaires
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D L
La finalité est toujours la même : vous pouvez faire tout les diplômes que vous voulez, seul le BTS OL est pris en compte, à moins de travailler dans un cabinet ophtalmologique.
Yannick Dyant
En effet Jeroen Henke, l'absence de valorisation des diplômes post BTS est un vrai problème.

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