eric_sibony_2.png

Eric Sibony, co-fondateur et directeur scientifique de la start-up

La lutte contre la fraude reste un enjeu majeur pour les complémentaires santé. Néanmoins, la détection des anomalies ou des abus ne s'avère pas toujours évidente en raison du volume des prestations de santé traitées chaque jour, mais surtout de leur gestion massivement automatisée en optique, en dentaire ou en audioprothèse.

Pour renforcer leur efficacité, certaines complémentaires santé veulent intégrer les dernières technologies d'intelligence artificielle (IA). Spécialisée dans les solutions d'automatisation et d'optimisation des décisions pour le secteur de l'assurance, la start-up Shift Technology expose dans un livre blanc les progrès réalisés en matière de lutte contre la fraude. Celle-ci s'opère de manière automatisée sur la base de scénarios préalablement établis. « Il peut s'agir d'aberrations médicales » comme la délivrance de verres progressifs pour un enfant de 5 ans, fait savoir la société française, ou encore d’incohérences géographiques : une consultation médicale à Lille suivie, dans la même journée, d’un achat optique à Grenoble et de la pose d’une prothèse dentaire à Brest…  


L'exploitation de data associée à l'expérience humaine 

Les outils d’automatisation génèrent des alertes, qui sont ensuite traitées manuellement : « Le traitement des données par des algorithmes permet d'identifier ces anomalies et de faire remonter ces alertes aux gestionnaires", explique Eric Sibony, co-fondateur et directeur scientifique de la start-up. "Ces alertes sont ensuite traitées par les gestionnaires : la décision finale est toujours humaine », insiste-t-il. 

 

Un outil pour les Ocam en optique

Selon ce livre blanc, la fraude à l'assurance santé représente au moins 1% des prestations liquidées par les Ocam chaque année, soit plus de 300 millions d'euros. Il cite une série d'exemples comme des ordonnances fausses ou falsifiées par l’assuré lui-même ou avec la complicité de son professionnel de santé. Il peut aussi s’agir d’une erreur de la part du professionnel de santé, d’un acte purement fictif (une prothèse dentaire qui n’a jamais été posée) ou d’une facture travestie (un forfait « lentilles » pour compléter la prise en charge d’une monture de lunette qui est désormais plafonnée à 100 €).  


Détection de la fraude en amont

Au fil des années, les algorithmes s'enrichissent pour une approche de plus en plus fine de ces cas avérés de fraude. D'où la nécessité de collecter un maximum de données. Dans le cadre de leur stratégie, les complémentaires santé misent principalement sur une détection des anomalies en amont du règlement de la prestation au professionnel de santé. Afin de réduire les paiements indus, Malakoff Humanis analyse par exemple chaque demande de prise en charge optique. D’autres complémentaires santé procèdent actuellement à des contrôles aléatoires. En outre, on peut légitimement penser que la montée en puissance des nouvelles technologies et le travail mené par les gestionnaires pourraient aussi contribuer à détecter, avant paiement, la fraude des professionnels qui ne font pas le tiers payant.