Un réseau de centres ophtalmologiques est visé par une enquête du parquet de Paris depuis l'été 2021 pour des soupçons de fraudes. Facturations non conformes, actes fictifs, déclarations manquantes, absence de médecin dans les centres…entre l’été 2021 et l’été 2022, vingt-six plaintes ont été déposées par l’Assurance maladie contre douze centres de santé ophtalmologiques situés en Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Normandie, Hauts-de-France, Pays de la Loire, Auvergne-Rhône-Alpes, Centre-Val-de-Loire et Grand Est. 

Le préjudice est estimé à au moins 7 millions d’euros. Si le dispositif législatif avait été adapté au moment des dépots de plainte, ce montant s'élèverait à plusieurs dizaines de millions d'euros : « en l'espace de 3 ans, entre 2018 et 2021, il y a eu des surfacturations de l'ordre de 150 millions, ce qui n'est pas négligeable », précise Thierry Bour, président du Snof (Syndicat des Ophtalmologistes de France). 

« En 2016, les centres de santé d'ophtalmologie représentaient 2% des dépenses en ophtalmologie de ville, aujourd'hui c'est 14%. On pense qu'un tiers des examens est utile, un tiers est facturé mais n'existe pas, et un tiers ne sert à rien ».

 

Un arsenal juridique qui s'étoffe 

Une enquête préliminaire a été ouverte le 6 juillet 2021 pour escroquerie et blanchiment en bande organisée, a confirmé à l'AFP le parquet de Paris, ce qui précise ce que nous annoncions dans nos colonnes l’an dernier. L'ouverture d'une enquête a permis de réaliser des perquisitions dans plusieurs centres d'ophtalmologie en décembre 2021

En parallèle, huit autres centres de santé ophtalmologiques, tous implantés en Ile-de-France, font actuellement l'objet de contrôle par les services de l'Assurance maladie, et les investigations ont permis de confirmer la suspicion d'actes fictifs. D’autres plaintes pénales devraient ainsi être déposées prochainement auprès du parquet de Paris.

De son côté, le Snof a porté plainte contre X le 15 septembre dernier auprès du parquet de Paris, en complément des plaintes déposées par l’Assurance maladie. « Aujourd’hui les pouvoirs publics ont les outils législatifs pour agir contre ces fraudes : engager des poursuites au pénal, mises en examen, fermeture de centres, déconventionnement d'urgence, remboursement de sommes indues...Mais ces procédures vont encore durer des années », regrette Thierry Bour, président du Snof.

 

En 2016, on comptait 90 centres avec plus de 500 patients par an*, 113 en 2019, et 220 fin 2021. Dans le même temps, les dépenses de la sécurité sociale en ophtalmologie ont été multipliées par 7, les centres représentant près de 15% des dépenses dans cette spécialité.

 

* Le seuil de 500 patients par an a été fixé pour éliminer les centres qui ne font de l'ophtalmologie que de façon accessoire.