« La vague non-compensée des départs à la retraite des ophtalmologistes prévue par la Drees et devant conduire à un effondrement de l’offre de soins oculaires, n’a pas eu lieu, bien au contraire », annonçait le Snof en septembre 2022. « D’après les prévisions, la part des nouveaux arrivants devrait s’équilibrer avec le nombre des départs à la retraite jusqu’en 2023, puis dépassera nettement ces départs en retraite en 2025 ». Pourtant,comme le soulève régulièrement la Fnof et le Rof, sur le terrain, de nombreux territoires peinent à assurer des délais de rendez-vous acceptables.

En décembre, un nouveau cabinet d’ophtalmologie à Belfort commençait à autoriser la prise de rendez-vous sur Doctolib. Le jour de son ouverture le 20 mars, l’agenda était déjà plein jusqu’à septembre 2023 !

Une démographie des ophtalmologistes qui stagne

La praticienne du cabinet, le Dr Bouzaien Trimesh, n’est pas vraiment surprise. Elle exerçait auparavant à l’hôpital nord Franche-Comté où la problématique est similaire aux cabinets libéraux : « Le désert médical s’étend partout dans la région de façon assez homogène, les délais se rejoignent : les patients portent bien leur nom puisqu’il faut compter entre 3 et 6 mois d’attente pour obtenir un rendez-vous ».

Plusieurs ophtalmologistes sont partis à la retraite ces dernières années à Belfort, et il y a très peu d’installations. On compte aujourd’hui 7 ophtalmologistes en libéral, y compris les 3 praticiens de la nouvelle maison de santé, la plus grande de France (4 000m2).

Si le maire de Belfort, Damien Meslot, estime que la ville n’est pas un désert médical, le délai moyen pour obtenir un rendez-vous ophtalmologique varie entre 3 et 6 mois pour les médecins conventionnés. Seul un ophtalmologiste est en secteur 2, ce qui permet des délais beaucoup plus courts, autour d’1 mois d’attente.

Attirer de nouveaux praticiens

« Il faudrait une meilleure organisation : que l’ophtalmologiste s’occupe davantage du traitement des pathologies que des renouvellements d’équipements optiques. Aujourd’hui, mon temps de travail est divisé à 50% entre ces deux activités ». C’est la raison pour laquelle elle est accompagnée de 2 optométristes, et en juin un orthoptiste viendra rejoindre l’équipe. Le cabinet, entièrement équipé avec du matériel dernier cri, peut accueillir encore 2 ophtalmologistes supplémentaires. « Il est difficile de trouver de nouveaux praticiens », poursuite le Dr Trimesh. « Il faut souvent les convaincre des avantages de l’exercice libéral et des atouts de s’installer dans une ville à taille humaine comme Belfort (50 000 habitants, ndlr) ».

Pour l’instant, elle n’a pas recours à la téléconsultation parce que cela ne permet pas de lui dégager du temps supplémentaire. Or, c’est précisément du temps qui lui manque pour assurer l’accès aux soins de la population : « D’ici 2 ans au plus tard nous ne pourrons plus accueillir de nouveau patient », anticipe-t-elle.