Une proposition de loi européenne à l'étude prévoit la mise en place d’un « espace européen des données de santé », qui mettrait à disposition des professionnels de santé de n’importe quel pays membre les données médicales d’un patient pris en charge.

L’association de consommateurs UFC-Que choisir Choisir et sept autres associations de consommateurs au sein du Bureau européen des associations de consommateurs (Beuc) signalent que « si l’utilité d’un tel dispositif est parfaitement compréhensible (accéder au dossier d’un patient inconscient accueilli aux urgences lors d’un séjour à l’étranger par exemple), elle ne doit pas pour autant masquer les risques de partage de données sensibles ». Selon une enquête réalisée par le Beuc dans huit pays européens, en février 2023, auprès de 8 067 personnes, dont 1 002 en France, 90% des personnes seraient opposées au partage d’informations sensibles, telles que la santé sexuelle et reproductive, fournies par exemple par des applications de suivi de cycle menstruel.

Plusieurs problèmes à l’horizon

Les associations de consommateurs pointent du doigt plusieurs aspects problématiques de cette proposition de loi européenne :

  • Il s’agirait d’une autorisation par défaut (nécessitant une action du patient pour « décocher » l’option partage) non compatible avec le principe fondamental de la législation européenne du consentement exprès et éclairé du partage de données.
  • La proposition prévoit que toute personne ou entité puisse demander l’accès à des ensembles de données de santé pseudonymisées ou anonymisées. Un tel partage créerait un risque de réidentification, en particulier pour certaines catégories telles que les données génétiques, qui par définition ne peuvent pas être anonymisées, et peuvent révéler l’état de santé ou bien l’origine ethnique ou familiale d’une personne.
  • Les autorités européennes prévoient l’autorisation de ce partage, même à des fins commerciales du moment que l’objectif affiché est la santé.
  • Enfin, 66% des consommateurs européens interrogés sont en désaccord et ne sont pas disposés à partager leurs données à travers les frontières. Ce chiffre monte à 92% si le demandeur est une compagnie d’assurance.

Fortes de ces constats, les associations de consommateurs appelent les autorités européennes à modifier et corriger ces points afin de garantir la protection des données de santé des membres de l'Union européenne.

Les plates-formes médicales très utilisées en France

Que ce soit le site de l’Assurance maladie (Ameli), de celui des mutuelles, ou encore de sites pour gérer ses rendez-vous médicaux comme Doctolib, la très grande majorité des français (96%) utilisent des plate-formes médiales en ligne selon l'UFC-Que choisir. En revanche, 47% des sondés craignent le vol de leurs données médicales. Concernant le partage de données médicales avec les soignants, la France à déjà fait un grand pas avec "Mon Espace Santé" : ce "coffre fort numérique" stocke automatiquement les documents de santé et il pourra aussi bientôt accueillir les comptes rendus d’hospitalisation ou les ordonnances du médecin généraliste par exemple. Pour l’instant, seuls 8,4 millions de français ont fait la démarche en ligne pour y avoir accès, pour un total de 120 millions de documents désposés.