La réforme de la profession d'opticien mise en oeuvre en avril 2007 a-t-elle eu l'effet escompté par les pouvoirs publics, à savoir le désengorgement partiel des salles d'attente des ophtalmologistes ? En aucun cas, estime Jean-Bernard Rottier, le nouveau Président du Snof (Syndicat National des Ophtalmologistes de France).
A l'occasion de la présentation du prochain congrès de la SFO (Société Française d'Ophtalmologiste), il a en effet déclaré que la pratique de la réfraction par les opticiens dans le cadre d'un renouvellement d'équipement (sur la base d'une ordonnance de moins de 3 ans) "a eu un impact nul sur les files d'attente dans les cabinets. Cette réforme n'a concerné qu'une partie marginale de la population, et les délais de rendez-vous sont inchangés, voire plus longs qu'auparavant".

Alors que cette problématique devrait s'aggraver avec la diminution du nombre d'ophtalmologistes, le vieillissement de la population et le développement de nouvelles thérapeutiques, Jean-Bernard Rottier mise dans un premier temps sur la délégation de tâches aux orthoptistes. Ceux-ci ont vu également leurs compétences s'élargir sur la base d'un décret de novembre 2007, qui les autorise entre autres à pratiquer la réfraction et à contrôler la motricité et le tonus oculaire. La délégation de ces trois étapes obligatoires d'une consultation ophtalmologique "nous fait gagner entre 7 et 13 minutes par patient" explique J.B. Rottier, en ajoutant : "nous pouvons ainsi voir 30% de patients en plus". La généralisation de cette délégation, "plébiscitée par la jeune génération d'orthoptistes", nécessite cependant une réorganisation du travail de l'ophtalmologiste. "Il nous faut aujourd'hui passer du cabinet traditionnel à la dimension d'entreprise médicale, avec ses implications économiques et déontologiques. Actuellement, 30% des ophtalmologistes coopèrent avec des orthoptistes, mais la présence d'un orthoptiste à plein temps ne concerne pour l'heure que 300 à 400 cabinets" déclare-t-il.

Pour réussir à terme cette délégation, Jean-Bernard Rottier plaide pour une augmentation du nombre d'orthoptistes formés - "au lieu des 155 diplômés par an, il en faudrait 300". "Avec 55 ophtalmologistes, il y a 200 professionnels nouvellement formés par an pour gérer 30 millions d'actes médicaux, et 1 600 nouveaux opticiens pour gérer 10 millions de lunettes par an !". Le Président du Snof attend également une augmentation du nombre d'écoles (la France en compte 15), et milite pour une harmonisation des formations. Il attend notamment des pouvoirs publics un soutien financier aux établissements, "qui fonctionnent actuellement sans budget et sans personnel suffisant".