Alors que la profession est attaquée de toute part et doit faire face à un contexte difficile, l'idée de vendre des équipements optiques en pharmacie fait son chemin et pourrait bien aboutir à une nouvelle concurrence. De fait, explique Daniel Buchinger, président du groupement Univers Pharmacie, à nos confrères du Figaro, « ce produit de santé [la lunette] était commercialisé dans les officines jusque dans les années 1960 ». Il ne voit donc rien d'anormal à revenir sur cette pratique. 

A cette heure où les autorités de santé multiplient les mesures pour faire baisser le coût des médicaments, avec un chiffre d'affaires des officines en recul de 2% en 2013 et, selon les experts, 10% des pharmacies qui devraient disparaître d'ici trois ans, le besoin de chercher de nouveaux relais de croissance se fait de plus en plus sentir. 
Tout comme l'orthopédie, la diététique, la podologie et l'audiologie (lire notre News : Sonalto prône l'audiologie auprès des opticiens (et des pharmaciens) comme relais de croissance dynamique), l'optique est considérée par les pharmaciens, dont les marges sont de 30%, comme un axe de développement. Selon Daniel Buchinger, « les ventes d'optique dégagent une marge deux fois plus élevée que celle des médicaments ». Fort de ce constat, il n'a pas hésité à développer des espaces baptisés « Tout l'univers de l'optique », de 25 à 30 m², installés dans une dizaine d'adhérents au groupement Univers Pharmacie. 

Un autre acteur s'est lancé en 2011 avec les « Carré de l'optique » et s'est installé dans une trentaine d'officines. « Notre modèle se rapproche de Boots, pharmacien et opticien majeur en Grande-Bretagne », détaille François Menge, PDG d'Unilens et ancien directeur de Lynx Optique. Les « Carré de l'optique » jouent sur les prix et ne vendent que des verres Essilor, se targuant même de réductions à 20% par rapport aux réseaux traditionnels. Univers Pharmacie propose, elle, des produits low-cost. 

A l'opposé, deux autres concurrents se sont lancés dans l'optique afin de bénéficier du trafic clients des pharmacies. Deux chaînes ont décidé de créer des magasins d'optique à proximité immédiate de leurs propres officines. Leader Santé, fondé début 2014, et Optique Lafayette, enseigne construite sur le modèle des Pharmacies Lafayette qui misent sur des prix low-cost tout en proposant « du choix et des compétences ». En termes d'objectif, le réseau Lafayette vise 70 officines et 25 magasins d'optique à fin 2014 (il existe 16 Optique Lafayette à ce jour, ndlr). 
Selon son DG, Hervé Jouves, « il n'y a pas de synergies sous le même toit parce que la pharmacie étant régis par le code de la santé publique, il n'y a pas de campagne de communication possible, ce qui n'est pas le cas avec les opticiens. La vente de médicaments n'a rien à voir avec la vente de solaires ou de lunettes de vue ! ». 
Et pour proposer du discount, les pharmaciens Lafayette baissent leurs marges, mutualisent les achats et signent des accords avec certains laboratoires. Ils compensent ensuite ces réductions par le volume des ventes qui, lui, augmente notablement. 
« Nous avons une approche “la vue pour tous“, précise-t-il. Nous proposons des équipements avec verres unifocaux à partir de 20 euros, et avec progressifs pour 59 euros. » Et il ne s'arrête là, le réseau Lafayette annonce vendre des lentilles de contact à des prix concurrençant ceux d'Internet. 

Cette situation démontre bien que notre secteur n'est pas le seul à se tendre. La crise économique pousse à la mutation et au renouvellement. Que ce soit pour les pharmacies ou notre profession, l'enjeu est de construire un nouveau business modèle qui pourrait être marqué par la diversification des activités en magasin avec un positionnement professionnel de santé et en développant des activités comme la Basse Vision, la contactologie, l'hyper conseil aux besoins des porteurs...

 

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