Inauguré fin 2024, le campus Louis Braille à Paris est devenu un lieu pivot de l'innovation dédiée au handicap visuel. Son directeur, Thibaut de Martimprey, revient pour Acuité sur les ambitions et les premiers mois d’activité d’un projet encore jeune, mais déjà très dynamique : il a même attiré l'attention de la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, Charlotte Parmentier Lecocq qui s'est rendue sur place mercredi 16 juillet.
À gauche, la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, Charlotte Parmentier Lecocq. À sa gauche, Andrea Khoshkhou, conseillère accessibilité, et Grégory Wirth, conseiller emploi et école pour tous
Un site unique en Europe
Porté par une ambition internationale, le campus s’organise autour de trois pôles : innovation, recherche et formation. Il se donne pour mission de favoriser l’émergence de solutions concrètes pour les personnes déficientes visuelles, en s’appuyant à la fois sur les avancées technologiques, les partenariats internationaux et une approche inclusive. « On accueille déjà quelques déficients visuels pour tester des dispositifs, mais on veut aller beaucoup plus loin, notamment en multipliant les liens avec le monde de la recherche et de l'entreprise », explique Thibaut de Martimprey.
[Retrouvez les dernières innovations incubées sur le campus Louis Braille ici.]
Tisser un réseau mondial
Le bilan des premiers mois est déjà riche : participation à plusieurs salons internationaux, prises de parole à l’ONU, déplacement en Espagne et bientôt au Brésil pour le sommet de l’Union Mondiale des Aveugles, un événement organisé tous les quatre ans. Objectif : fédérer une alliance mondiale des centres d’innovation autour du handicap visuel. « On ne peut pas porter une ambition internationale depuis Paris sans relais. On a déjà des contacts aux États-Unis, en Écosse, en Angleterre ou en Espagne », précise-t-il. L’ambition est claire : mutualiser les expertises, partager les données issues des tests utilisateurs, et faire émerger une véritable communauté mondiale de l’innovation inclusive.
Le campus Louis Braille organise des journées pour tester les dernières innovations par le consommateur final
En France, le campus s’inscrit dans un maillage territorial fort, porté par quatre fondateurs qui disposent d'un important réseau régional. Le site parisien dit "Duroc" vient compléter ce réseau par une fonction de vitrine, de démonstration et de rayonnement. Il développe également une offre de formation à destination des entreprises, des institutions et des collectivités, avec un objectif : mieux faire connaître le handicap visuel et accompagner les politiques d’accessibilité.
Multiplier les innovations et les rendre accessibles
Ancien consultant chez Accenture, Thibaut de Martimprey, 37 ans, s’est reconverti dans l’innovation et l’événementiel. Lui-même malvoyant de naissance, il porte une vision concrète et engagée du progrès. En parallèle du campus, il œuvre aussi comme commissaire d’accessibilité pour Bourges 2028, capitale européenne de la culture.
Convaincu que la technologie ne suffit pas sans l’innovation sociale, il mise sur des solutions à la fois utiles, accessibles financièrement et durables. L’intelligence artificielle, les lunettes connectées ou les outils de guidage audio sont au cœur de cette nouvelle donne technologique. Mais le coût reste un enjeu majeur : certaines aides techniques peuvent atteindre 10 000 euros. « L’enjeu aujourd’hui, c’est leur reconnaissance comme dispositifs médicaux, pour qu’ils puissent être remboursés. Sinon, ils resteront hors de portée de la majorité des personnes concernées. »
Rendre accessible le monde de la culture aux déficients visuels est l'une des missions du campus
Le campus Louis Braille entend ainsi jouer un rôle clé dans l’écosystème de l’innovation inclusive : en testant, en formant, en mettant en réseau, mais aussi en plaidant pour des politiques publiques qui favorisent l’accès équitable aux outils d’autonomie. Une mission ambitieuse, portée avec pragmatisme et conviction par son directeur et une équipe passionnée.
Dans le monde, on compte environ 250 millions de déficients visuels, dont plus d'1 million en France.