r_feldmann.jpgVous venez de recevoir un avis de passage de l’Urssaf en vue d’un prochain contrôle de la déclaration et du paiement de vos cotisations sociales ? Sachez que vous faites partie des 11% d’employeurs qui font l’objet d’un contrôle de la part de l’Urssaf chaque année. Quelle attitude adopter ? Quelles dispositions prendre et quels sont vos recours ? Nous avons interrogé Me Romuald Feldmann, avocat fiscaliste au Barreau de Paris, pour vous prodiguer quelques conseils avertis.

A l’issue de ce contrôle, selon les statistiques 2015 de l’Acoss (Caisse nationale des Urssaf), vous aurez 67% de risques de subir un redressement (plus de 80% si vous dirigez une PME). Si vous êtes dans la moyenne des cotisants, ce redressement s’élèvera, hors majorations, à 21 000€ (70 000€ si des faits de travail dissimulé vous sont reprochés).

Rien de surprenant à cela, puisqu’on estime généralement que les entreprises sous cotisent à hauteur de 6% des cotisations réellement dues. Une mauvaise application des règles de droit, de plus en plus complexes, et un paramétrage défaillant des logiciels de paie en sont les principales causes.

Comment réagir à un contrôle Urssaf ?

Les redressements qui impactent le plus les finances des entreprises portent principalement sur les points suivants :

  • requalification en personnel salarié et travail dissimulé (ce poste représente aujourd’hui, à lui seul, 1/4 des redressements) ;
  • frais professionnels, avantages en nature et en espèces (9% des redressements) ;
  • frais de santé, prévoyance complémentaire et retraite supplémentaire ;
  • indemnités de rupture ;
  • participation, intéressement et épargne salariale ;
  • dispositifs d’allègement de charges sociales (16% des redressements) telles que la réduction Fillon, les exonérations zonées, l’exonération « jeunes entreprises innovantes »…

Au vu de ces éléments, vous avez donc tout intérêt à ce que le contrôle que vous allez subir se déroule bien. Pour ce faire, il est important de :

 Vous préparer avec vos équipes comptables et un avocat spécialisé, aussitôt l’avis de passage reçu. Ce travail vous permettra d’identifier vos risques, de supprimer ce qui peut encore l’être et de réduire au mieux les autres. La réalisation d’un mini audit des postes les plus à risque peut être un moyen efficace de préparer votre défense face à l’inspecteur. Il peut aussi être l’occasion de vérifier les postes sur lesquels vous cotisez au-delà de vos obligations. Une fois ces postes identifiés, vous pourrez demander à l’inspecteur de dégager un crédit de cotisations en votre faveur dans le cadre du contrôle, diminuant ainsi le montant du redressement à venir.

Si vous avez déjà fait l’objet d’un contrôle, il est recommandé d’étudier attentivement la lettre d’observations auquel il a donné lieu, car l’inspecteur peut commencer sa vérification par les chefs de redressement et les observations qui ont été formulés lors du précédent contrôle. Cette étude vous aidera, le cas échéant, à vous opposer à un redressement sur un point que l’Urssaf a implicitement validé antérieurement.

Collaborer pleinement aux opérations de contrôle, afin de répondre aux demandes de l’inspecteur et expliquer les difficultés qui ne manquent pas de survenir dans la gestion de l’entreprise. En vue d’une éventuelle contestation, il est important de conserver les échanges (emails ou courriers) avec l’inspecteur et de noter scrupuleusement les documents qui lui sont remis, ainsi que les informations auxquelles il accède.

Analyser très attentivement la lettre d’observations notifiée par l’inspecteur à l’issue du contrôle. Si vous y décelez des erreurs ou souhaitez obtenir des éclaircissements, vous pouvez formuler dans les 30 jours des observations, auxquelles l’inspecteur est tenu de répondre. Pour répondre à l’Urssaf, il est recommandé de vous faire accompagner d’un avocat spécialisé, qui saura soulever les bons arguments au moment le plus adéquat.

En cas de redressement, vous recevrez une mise en demeure que vous pourrez contester devant la Commission de recours amiable de l’Urssaf (CRA) et, en cas de rejet de votre requête, devant le Tribunal des affaires de Sécurité sociale (TASS).

La contestation peut aussi bien porter sur tout ou partie des chefs de redressement notifiés, sur la procédure de contrôle que sur la mise en recouvrement des sommes réclamées par l’Urssaf.

Si vous décidez de ne pas contester le redressement, vous devrez le régler, sans quoi l’Urssaf délivrera à votre encontre une contrainte, à laquelle vous pourrez toujours vous opposer en saisissant le TASS. Vous pouvez demander un échelonnement de la somme réclamée et une remise des majorations.

Quelles sont vos voies de recours ?

Il convient de noter que les voies de recours sont enserrées dans des délais très courts :

  • 2 mois pour contester la mise en demeure devant la Commission de recours amiable (CRA) à compter de sa notification ;
  • 2 mois pour saisir le Tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) à compter de la décision de rejet implicite (si la CRA ne s’est pas prononcée dans le délai d’un mois suivant sa saisine, ce qui est en pratique toujours le cas) ou explicite de la CRA ;
  • 15 jours pour saisir le TASS à compter de la notification ou signification par huissier de la contrainte.

Aujourd’hui, seules 8% des entreprises redressées affirment avoir contesté une décision de l’Urssaf*. Ce faible taux de contestation s’explique par la crainte que suscite encore l’Urssaf, mais n’est pas justifié :

  • D’abord, parce que la plupart des contrôles ou des redressements sont contestables. Il est même de plus en plus rare que le montant réclamé à la suite d’un contrôle soit fondé dans sa totalité.
  • Ensuite, parce qu’une contestation auprès de la CRA et du TASS suspend l’obligation de payer le redressement. Mais attention, le non-paiement d’un redressement contesté présente aussi des inconvénients. Une contestation à elle seule ne suspend pas le court des majorations et le non-paiement du redressement empêche l’Urssaf de délivrer des attestations de compte à jour jusqu’à la saisine du TASS, ce qui peut se révéler en pratique très pénalisant vis-à-vis de votre clientèle ou de Pôle emploi lorsque vous avez recours à des contrats aidés.
  • Enfin, parce qu’il ressort de notre propre expérience qu’une contestation conduit dans la très grande majorité des cas à une réduction ou une annulation du redressement, voire à une annulation de la procédure de contrôle.

Au moindre doute sur le respect de vos droits, n’hésitez donc pas à vous rapprocher d’un avocat spécialisé capable de vous conseiller sur l’opportunité d’une action et sur la stratégie à adopter face à l’Urssaf. L’expérience prouve que les entreprises accompagnées dans leur contestation par un conseil obtiennent de bien meilleurs résultats que celles qui ne le sont pas.

 

*Source : Cabinets Atequacy et Junior Essec Conseil – « Le contrôle Urssaf en questions, Enquête & Best-Practices, éd. 2012 »,