Acuité : Quelle est la position du Rassemblement des opticiens de France sur cette proposition d’interdire la publicité pour les lunettes ?
Jean-François Porte, président du Rof : Notre position est simple. Cette mesure figure dans le rapport Charges et Produits de la Cnam, mais ce n’est aujourd’hui qu’une option. Rien ne garantit qu’elle sera appliquée. Nous restons prudents et attendons de voir ce qui sera réellement décidé.

C’est d’ailleurs assez paradoxal. Les mêmes acteurs qui ont construit leurs offres optique, audio et dentaire, reprochent aujourd'hui leur coût. On ne peut pas inciter à la prise en charge et ensuite accuser ces dispositifs de coûter trop cher.

AC : La publicité est-elle selon vous responsable de la hausse des dépenses ?
JFP : Non. Aucune étude n’a démontré que la publicité faisait augmenter le volume d’équipement. L’augmentation des dépenses est principalement due au vieillissement de la population, à la presbytie, ainsi qu'à la myopisation des enfants. Ce n’est pas un phénomène exponentiel, mais une évolution logique liée aux besoins structurels des patients.

En plus, il ne faut pas oublier que la délivrance des lunettes est strictement encadrée. Elles ne sont fournies que sur présentation d’une ordonnance valable. Cela signifie qu’un professionnel de santé a objectivement constaté le besoin médical.

AC : Quel rôle joue la publicité dans ce secteur ?
JFP : Pour nous, la publicité contribue à réguler le marché. Elle permet aux consommateurs de comparer les offres et de connaître les différentes solutions disponibles. C’est un outil qui favorise la concurrence, et qui a aussi contribué à démocratiser et valoriser le port de lunettes.

Pendant des années, elle a aidé à décomplexer les porteurs, à transformer l’image des lunettes qui sont devenues un accessoire esthétique et technologique.

AC : Que répondez-vous à ceux qui parlent de surconsommation ?
JFP : Cet argument est infondé. Si 70 % des Français portent des lunettes, et 95 % chez les presbytes, c’est parce qu’il y a un besoin médical réel, pas parce qu’ils ont vu une publicité. L'interdiction de la publicité concerne d'habitude plutôt les produits qui portent atteinte à la santé publique.

AC : Faut-il encadrer davantage ces pratiques ?
JFP : C’est un sujet qu’on peut évidemment discuter. Si un encadrement spécifique est jugé nécessaire, il faudra d’abord apporter des éléments objectifs, des études sérieuses et des chiffres précis. Pour l’instant, tout repose sur des hypothèses.