Il aura fallu trois mois pour que le gouvernement réponde. En avril dernier, la députée Sandrine Le Fleur (Renaissance – Finistère) a interpelé le ministre de la santé au sujet de la reconnaissance des opticiens de santé en mobilité pour répondre au problème des déserts médicaux. Un bon moyen, selon elle, de libérer du temps médical et d’apporter un service aux patients isolés, rappelant que 64 % des départements sont classés comme « déserts ophtalmologiques ».

En conséquence, Sandrine Le Fleur a demandé au ministre de « reconnaître le rôle des opticiens de santé en mobilité afin de mettre à profit leurs compétences au bénéfice des patients et d'engager un travail les intégrant à l'avenant 9 de la convention médicale pour la pratique de la télé-expertise qui leur permettrait de recourir à la télé-expertise en lien avec les ophtalmologistes ». Une solution sur laquelle le Road (regroupement des opticiens à domicile) s'est exprimée récemment.

Une réponse en demi-teinte

Dans une réponse publiée le 11 juillet au Journal officiel, le gouvernement souligne quatre points sans toutefois trancher la question des opticiens mobiles.

  • Les professionnels paramédicaux de la filière visuelle et notamment les opticiens, ont vu leurs effectifs augmenter de 57% depuis 2012, renforçant l’accès aux soins.
  • Une expérimentation d’une durée de trois ans est déjà en cours et le gouvernement ne se prononcera qu'une fois qu'elle aura été menée à terme. Lancée le 1er janvier 2022, elle s'achèvera en décembre 2024. Elle permet aux opticiens-lunetiers candidats des régions Centre Val-de-Loire et Normandie d'intervenir en Ehpad afin de réaliser des réfractions et d'adapter, dans le cadre d'un renouvellement, les prescriptions médicales initiales de verres correcteurs et de lentilles de contact en cours de validité.
  • Récemment, les opticiens-lunetiers ont vu leurs compétences élargies en matière d'adaptation via la loi du 19 mai 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, qui leur permet de procéder à une adaptation des verres ou lentilles dès la première délivrance sur accord du médecin.
  • Le texte adopté à la suite de la loi de financement pour la sécurité sociale de 2022, a étendu le champ de compétences des orthoptistes en leur permettant de réaliser un bilan visuel et de prescrire des verres et lentilles, mais également de réaliser certains dépistages chez l'enfant. Les opticiens-lunetiers bénéficient de cette mesure, par ricochet, qui leur permet dès à présent de délivrer des montures sur prescription d'un orthoptiste.

Cette réponse parait peu satisfaisante puisque, bien que le nombre d'opticiens a effectivement augmenté, cela n'a pas permis d'améliorer suffisamment l'accès aux soins visuels comme en témoignent les déserts médicaux que le gouvernement ne nie pas pour autant. 

L'expérimentation en Ehpad par des opticiens mobiles semble pourtant faire écho au projet du gouvernement de créer 100 médicobus dans les prochaines années. 

La primo-prescription par les orthoptistes reste soumise à de nombreuses contre-indications : il n'y pas, pour le moment, de bilan de l'efficacité de cette jeune mesure. 

L'absence de réponse concernant la téléexpertise est elle aussi frappante : depuis des mois sur Acuite nous décrivons les différentes solutions de téléconsultation en ophtalmologie, ainsi que leurs limites au niveau règlementaire. Et depuis autant de mois, nous ne pouvons être que surpris de l'absence de prise de position du gouvernement sur cette question, bien que la LFSS 2023 ait initié un début de règlementation