Ophtalmologistes, orthoptistes et opticiens étaient réunis lors de la journée du Snof (syndicat national des ophtalmologistes de France) pour une table ronde très attendue le 13 septembre. Si le climat a été jugé serein et constructif, les échanges ont aussi révélé une vigilance partagée face aux excès de la filière et aux modèles commerciaux qui fragilisent la continuité des soins.
Une démographie mieux orientée
La discussion a d’abord porté sur la démographie des prescripteurs. Selon Thierry Bour (Snof), la situation des ophtalmologistes s’améliore nettement : « Le dur est derrière nous. Les projections montrent une hausse modérée, jusqu’à 6 500 ou 7 000 praticiens dans les prochaines années. » Notons que, d'après la Drees, au 1ᵉʳ janvier 2025, la France comptait 5 981 médecins ophtalmologistes en activité, retraités et ophtalmologistes étrangers compris.
Les orthoptistes en hausse
Du côté des orthoptistes, la dynamique est plus marquée encore, avec plus de 9 000 professionnels attendus en 2030, contre 7 000 aujourd'hui. Un chiffre qui n’inquiète pas les représentants présents, mais qui appelle à un meilleur équilibre entre le nombre d’étudiants, les capacités de formation et les terrains de stage.
Le nombre de magasins d'optique pose question
Quant aux opticiens, la question du nombre de magasins a fait débat. Certains estiment qu’il existe un risque de saturation du marché, d’autres défendent au contraire un équilibre actuel. Pour le président du Snof, Vincent Dedes, « c’est un sujet professionnel délicat. Le danger, c’est de forcer artificiellement la demande par une multiplication de points de vente, ce qui peut avoir des effets pervers sur toute la filière. »
Primo-prescription : des retours rapides qui renforcent la confiance
L’un des points positifs soulignés lors des échanges concerne la primo-prescription. Une enquête menée récemment par la Fnof a montré que les délais de réponse des ophtalmologistes aux demandes étaient très courts. « Nous pensions que cela pouvait prendre du temps, mais en moyenne, la réponse intervient en deux à trois jours seulement », a reconnu Vincent Dedes.
Un constat partagé par les opticiens et orthoptistes, qui y voient un signe encourageant pour fluidifier le parcours patient et renforcer la confiance entre professions.
Télé-expertise : une ligne rouge commune
Sujet sensible, la télé-expertise a été largement discutée. Tous ont exprimé leurs inquiétudes face à des pratiques jugées dévoyées. « On voit arriver dans nos cabinets des patients avec des ordonnances délivrées à distance, sans qu’aucun médecin ne les ait vraiment vus. On a aussi une recrudescence des ordonnances optiques émises par des médecins généralistes », précise Vincent Dedes.
Ce dernier a rappelé la position du syndicat : « Nous ne sommes opposés à la télémédecine, mais elle doit respecter la relation médecin-patient. L’échange oral est une condition indispensable. Les modèles actuels de téléexpertise ne la garantissent pas et posent un vrai problème déontologique. »
DMP et messageries sécurisées : un chantier à accélérer
Enfin, la table ronde a insisté sur la nécessité de mieux outiller la filière pour communiquer. Le Dossier Médical Partagé (DMP) et les messageries sécurisées sont appelés à devenir des standards pour fluidifier et sécuriser les échanges, si la Caisse d'Assurance maladie y mettait les moyens. « C’est une étape incontournable pour que la filière fonctionne en réseau », a conclu Vincent Dedes.
Un climat constructif
Au final, la table ronde des “trois O” a montré que, malgré des divergences de vues sur certains sujets, le dialogue restait apaisé et constructif. « On pouvait craindre des affrontements, mais les échanges ont été calmes, argumentés et respectueux. Cela donne de la lisibilité à l’ensemble de la filière », conclu le président du Snof.
