Top départ ! L'Autorité de la concurrence lance aujourd'hui la consultation publique sur son bilan d'étape, dans le cadre de son enquête sur les audioprothèses. Elle appelle les acteurs du secteur à se prononcer sur les problématiques concurrentielles qu'elle a identifiées. Les intéressés peuvent présenter leurs observations jusqu'au 20 septembre.

Des contraintes légales ou réglementaires

Fabricants, audioprothésistes, associations de consommateurs, associations de patients, syndicats professionnels… sont ainsi invités à répondre aux 46 questions posées et qui résultent des auditions menées depuis février dernier. Les principales problématiques ont été identifiées sur « le marché aval, très atomisé puisque 3 250 audioprothésistes se le partagent, explique l'institution. Ces derniers se répartissent entre deux types d'enseignes : celles spécialisées dans l'audition et les enseignes d'optique qui se sont diversifiées en ouvrant des corners ou des centres dédiés ». Si l'organisation de la distribution induit un certain niveau de concurrence, les problématiques identifiées sont notamment liées à des contraintes légales ou réglementaires, pouvant empêcher un fonctionnement optimal du marché.

Le couplage de l'appareil et des prestations de suivi freine-t-il la baisse des prix ?

Première question posée par l’institution qui estime que « ce couplage présente plusieurs inconvénients » :

  • Il renchérit le coût immédiat de l'appareillage et peut amener les patients les plus sensibles au prix à renoncer à s'équiper.
  • Dans la mesure où le paiement est forfaitaire et concerne une période de 5 à 6 ans (« paiement prospectif »), certains patients paient pour des services qu'ils n'utiliseront pas en totalité.
  • Par ailleurs, certains patients qui nécessitent un suivi moins important paient le même prix que ceux qui sont davantage suivis.

Pour l’Autorité, une alternative consisterait à découpler l'achat de l'appareil de celui des prestations de suivi du patient. « Elle présenterait l'avantage de renforcer la transparence tarifaire en donnant tout son sens au devis et de permettre aux patients de mettre en concurrence les audioprothésistes sur les prestations de suivi ».

Mais un tel découplage présente aussi plusieurs risques, comme celui pour le patient de payer une double marge, s'il s'adressait à deux audioprothésistes différents pour l'appareillage et pour le suivi.

Vers une régulation tarifaire ?

Alors que les acteurs du secteur ont insisté sur le faible remboursement de l’audio, l’Autorité de la concurrence s'interroge sur une régulation des prix pratiqués par les audioprothésistes afin que la diminution du reste à charge bénéficie effectivement aux patients.
A cet égard, plusieurs pistes pourraient être prises en considération pour l’Assurance Maladie :

  • lancer un appel d'offres auprès des fabricants qui permettrait de les référencer en vue d'un remboursement à des prix plafond.
  • proposer le remboursement d'un certain nombre de forfaits plafond, notamment pour les prothèses d'entrée et de moyenne gamme.
  • fixer un plafond de remboursement pour l'ensemble de la vente (appareil, adaptation, suivi), notamment pour les prothèses d'entrée et de moyenne gamme, et à soumettre à son approbation préalable le devis normalisé en vue du remboursement. 

Le numerus clausus est-il justifié ou doit-il être relevé ?

Troisième point abordé par l’Autorité de la concurrence : le numerus clausus. « La liberté tarifaire pour les audioprothésistes,  et le faible niveau de remboursement des audioprothèses par l'Assurance maladie (120 € par appareil) posent la question des justifications de ce quota en l'espèce, explique l’institution.  Il reste que toute remise en cause du quota ou son relèvement impliqueraient de revoir à la hausse les capacités de formation actuelles des audioprothésistes ».
« Une offre supplémentaire de professionnels pourrait avoir un effet positif. D'une part, en équilibrant l'offre et la demande de travail, cette mesure pourrait se traduire par un réajustement à la baisse des salaires versés aux audioprothésistes et donc du coût des prestations d'adaptation et de suivi. D'autre part, elle permettrait aux nouveaux entrants qui rencontrent des difficultés de recrutement de se développer plus facilement et de stimuler la concurrence sur le marché », écrit-elle.

Le développement des réseaux de soins doit-il être favorisé ?

Enfin, l'Autorité s'est toujours montrée favorable aux réseaux de soins eu égard à leur capacité à animer la concurrence. « Les effets bénéfiques des offres de ces réseaux sont en effet importants tant pour les professionnels de santé affiliés (afflux de clientèle, visibilité) que pour les patients adhérents (prix plus bas et meilleure prise en charge, restauration d'une certaine symétrie d'information en faveur du patient) », estime-t-elle.
Pourtant, certains acteurs du secteur critiquent la constitution de ces réseaux avançant que « les prix particulièrement bas ne permettraient pas d'assurer des prestations de qualité et que des patients renonceraient à s'équiper auprès des audioprothésistes affiliés ». Afin d'objectiver ces propos, l'Autorité pose notamment les questions suivantes :

  • Existe-t-il des données objectives permettant de soutenir les affirmations selon lesquelles le temps passé des audioprothésistes affiliés ne serait pas adéquat ? 
  • Le niveau de prix de certains réseaux de soins serait-il objectivement incompatible avec le maintien de la qualité des soins ?

Les contributions reçues par email permettront d'éclairer utilement l'Autorité dans son analyse en vue des recommandations qu'elle fera dans son avis définitif en fin d'année.