Le Medef s'immisce dans la santé publique, le temps d'un rapport publié le 9 juillet 2025 (disponible en pièce jointe).
Il dresse d'abord un diagnostic, avant de poser 93 solutions pour améliorer le système de santé français devenu financièrement incontrôlable. 

En optique, les solutions évoquées par le Medef ont déjà été exprimées par d'autres ces dernières semaines, à commencer par la Mutualité Française ou l'Assurance maladie. Le Medef considère qu'il est nécessaire d'aller encore un peu plus loin.

 

Les propositions du Medef

 

  • "Confier aux Ocam la prise en charge complète des frais d'optique (lunettes et lentilles), avec un désengagement de l'Assurance Maladie Obligatoire (AMO). "Les Ocam reprendraient alors la main sur les négociations professionnelles et la régulation, notamment via des réseaux de soins, qui ont montré leur efficacité pour maîtriser les dépenses et réduire le reste à charge" selon le rapport. Il faut notamment "faire des assurés de véritables acteurs de leur santé, en récompensant les comportements vertueux". Interprétons qu'il faudra donc éviter de devenir myope ou presbyte, si on n'est pas lié à un réseau de soins !
  • "Allonger les délais de renouvellement et réviser le cadre du dispositif "100% santé" dans les trois domaines : optique, dentaire, audioprothèses". Sans plus de détail dans ce rapport.
  • "Dissocier, dans les remboursements optiques, la partie technique à couvrir de la partie esthétique, cette dernière restant à la charge de l'assuré. Ces évolutions devront être analysées en fonction de l'impact global du dispositif "100% santé" et en lien avec les secteurs économiques concernés". On peut imaginer que si le porteur souhaite une monture qui n'est pas du panier A, il ne pourra plus bénéficier d'une prise en charge de 100 euros maximum. Ce qui reviendrait à favoriser les montures et verres d'entrée de gamme et la production en dehors de la France ou de l'Union européenne, ce qui achevait le peu d'industries dynamiques en optique-lunetterie sur le territoire national et serait même contradictoire aux objectifs écologiques de la Cnam
  • Selon le Medef "ces propositions pour le "100% santé" pourraient générer des économies potentielles allant jusqu'à 800 millions d'euros". Sans aucun autre détail, explication ou démonstration. 

 

Le ministère de la Santé, qui parlait encore de bras de fer avec les Ocam il y a quelques mois, semble avoir été convaincu par les arguments de la Mutualité Française et de France Assurance. 

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Le classement des 10 activités de santé qui fraudent le plus en 2024. Source : Assurance maladie. Si pour les audioprothésistes il s'agit de fraude en bandes organisées, les opticiens ne font pas parti de la liste

 

Tous les acteurs financeurs, veulent aujourd'hui réduire leurs charges en s'alimentant sur les remboursements de l'optique, et d'autres professionnels de de santé : les audios, les kinés à qui on a annoncé le report de la revalorisation de leur rémunération, les pharmaciens, pour qui le gouvernement veut plafonner la marge sur les génériques à 20 % (40% actuellement). Ce projet de loi vise à réduire une bonne partie de la rémunération des pharmacies mais va accélèrer la fermeture de nombreuses officines. Sachant que 4 pharmacies ferment déjà par semaine. Avec cette baisse c'est un réseau de proximité qui va s'effondrer.

En quelques semaines, des sujets aussi sensibles que le renouvellement des équipements optiques passant de 2 à 3 voire 5 ans ont été soulevés, ainsi que l'interdiction de la publicité pour les lunettes, ou encore la remise en cause du nombre de magasins en France*. Si les diféfrentes mesures sont mises en place en optique, on assistera aussi à des fermetures de magasins et donc à une réduction du maillage et de la proximité entre la population et leur opticien.

Ce faisceau de rapports, études et déclarations porte à croire qu'à la rentrée des propositions seront inscrites dans le PLFSS 2026, concernant au moins les 3 secteurs optique, dentaire, audioprothèses. A suivre.

 

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Répartition des dépenses optiques en France, en 2023, selon la Drees

 

 

*Dans son rapport Charges et Produits pour 2026, la Cnam dit, concernant les magasins d'optique : "la France compte un réseau de distribution beaucoup plus dense que ses voisins européens. Cette densité pèse sur les coûts du secteur et peut être mise en rapport avec le prix particulièrement élevé de l’optique en France". Prix élevé pour qui ? En tout cas ni pour le porteur, ni pour l'Assurance maladie.