ericplat.pngEric Plat, PDG d’Atol les Opticiens, se veut optimiste pour le reste de l’année. Le dirigeant a été interviewé après Marcel Cézar, directeur de la franchise Acuitis et Didier Pascual, PDG du groupe Afflelou. Réactions, ressentis, objectifs, marché, tous les thèmes sont abordés avec les patrons des principales enseignes. Nous ferons de même avec les responsables des centrales d'achats.

Acuité : Comment se sont déroulés les premiers jours de la reprise ?

Eric Plat : Nous sommes en moyenne à 100% du chiffre d’affaires à fin mai par rapport à la même période l’an dernier. Tous les magasins, qu’ils soient en centre-ville ou dans les centres commerciaux (sauf exception de fermetures prolongées), fonctionnent sur un rythme comparable. C’est encourageant pour la suite. Nous avons également identifié 4 points qui augurent de l’optimisme.

Tout d’abord, en sortie de confinement, les Français ont un pouvoir d’achat supérieur. Celui-ci a crû de 55 milliards d’euros pendant cette période de consommation au ralenti. La baisse des salaires a été contrebalancée par un recul des dépenses durant le confinement.

Par ailleurs, contrairement au reste de l’Europe, la mutualisation des frais de santé en optique joue un rôle d’amortisseur et de maintien du marché. Il ne faut jamais l’oublier.

L’achat plaisir en fin de crise est un puissant stimulant de la consommation. Les porteurs sont attirés en particulier par des produits conjuguant « plaisir » et « nécessité ». L’optique fait totalement partie de cette catégorie.

Dernier point essentiel : l’usage des écrans durant cette période de confinement a révélé les défauts visuels, pour les personnes utilisant énormément les outils digitaux. De nouveaux porteurs arriveront donc sur notre marché plus rapidement.

A. Quelles mesures avez-vous prises pour le redémarrage rapide de l’activité ?

E.P : Nous avons maintenu nos budgets de communication et accéléré la digitalisation. Nous avions lancé récemment la notation de nos magasin grâce à l’outil Critizr pour encourager nos clients à dire tout le bien qu’ils pensent de nos magasins Atol et en sortie de crise dès le 11 mai, nous avons renforcé notre offre digitale en lançant la prise de rendez-vous sur le même modèle que Doctolib. Nous pourrons synchroniser ces rendez-vous avec notre logiciel point de vente d’ici quelques jours. L’opticien détermine des plages horaires où il est disponible, pour une vente de lunettes, de lentilles, un examen de vue ou une livraison. Le consommateur est invité à choisir son type de rendez-vous et l’opticien en est automatiquement informé. C’est toute l’organisation du magasin qui s’en trouve changée améliorant les relations et les interactions avec nos clients.

Autre initiative : la digitalisation de notre offre de lentilles de contact et de lunettes de soleil. Lancé en février, notre site internet était opérationnel durant le confinement pour recevoir des flux importants de commandes de lentilles de contact. Au total, 70% des ventes sur internet ont été réalisées avec de nouveaux clients, les anciens étant restés majoritairement fidèles aux magasins physiques. Nous souhaitons désormais attirer ces nouveaux porteurs dans nos points de vente grâce à des systèmes de stimulation très puissants. Élément différenciateur, chez Atol : quand un consommateur achète en ligne, il est obligé de sélectionner son magasin Atol. La marge revient donc intégralement à l’opticien sélectionné. Notre site n’est pas concurrent des associés.

Par ailleurs, l’épidémie a permis de resserrer les liens entre les associés et de travailler cet esprit communautaire. Des groupes whatsapp animés par nos ambassadeurs et nos administrateurs ont été créés par région et sont très actifs.

A. Alors que sur les 4 premiers mois de l’année le marché de l’optique est à -36%, quelles sont vos estimations pour l’année complète ?

E. P : Sur les mois à venir, même si nous attendons une inflexion liée à la baisse du nombre de consultation chez l’ophtalmologiste, le scénario catastrophe n’aura pas lieu. S’il y a rebond de la maladie, nous avons désormais un savoir-faire, des masques, des tests de dépistage. Seuls des clusters peuvent se créer. Je ne crois pas à un reconfinement général. Nous avons appris à gérer cette crise. De manière plus globale, j’espère que la baisse du marché de l’optique ne sera pas supérieure à -15%. Nous avons encore 7 mois d’activités. En poursuivant sur le même rythme qu’en mai et en juin 2019, et avec les mois suivants en fortes croissances, nous avons de quoi contrebalancer en partie la baisse annoncée de -20% à -30%.

Les opticiens doivent intégrer l’évolution des modes de consommation, notamment le besoin de digitalisation. Ceux qui en seront capables tireront leur épingle du jeu. Il faut s’adapter à la nouvelle façon de mettre à disposition des porteurs nos produits.

A. Compte tenu de la situation, quand les opticiens pourront-ils retrouver une activité proche de celle de 2019 ?

E.P : C’est une question de semaines. Les opticiens retrouveront une activité plus sécurisée d’ici le mois de juillet ou août lorsque les cabinets d’ophtalmologie auront retrouvé leur rythme. Les opticiens ont aussi la possibilité d’appliquer leur délégation de tâche en matière de renouvellement. S’il y aura vraisemblablement un creux dans les semaines à venir, les besoins en optique vont continuer d’augmenter entre autre à cause de l’usage des écrans toujours plus grand.

A. Quelle est votre stratégie post-confinement ?

E.P : Nous souhaitons poursuivre dans l’innovation et la digitalisation. Des communications centrées sur le client et la santé et pas sur le prix et la promo. Continuer nos très belles collections de montures en marque propre dont les ventes ont explosé l’an dernier, apportant des marges substantielles aux associés Atol. S’ensuivra la montée en puissance de nos verres Origine France Garantie (OFG) Anaxio fabriqués par Novacel, complémentaire de nos partenariats avec Essilor et Zeiss. Dans les jours à venir, nous lancerons les lunettes anti-chute Atol Zen en partenariat avec Allianz Assistance et en septembre prochain, des lunettes qui corrigent la dyslexie, primées au Silmo d’Or 2019 et au CES de Las Vegas 2020.