Depuis le 10 janvier, nous avons relayé les grandes difficultés que vous rencontrez en magasin avec l’entrée en vigueur, pour le moins chaotique, de la réforme 100% Santé. Dans leurs dernières newsletters respectives, les deux syndicats d’opticiens, la Fnof (Fédération nationale des opticiens de France) et le Rof (Rassemblement des opticiens de France) détaillent leurs actions entreprises à ce jour pour trouver une issue à cette situation qui entrave votre activité.

Impréparation et blocage des Ocam

La liste des dysfonctionnements dont vous pâtissez durement depuis le début de l’année est longue : fermeture des portails, refus de PEC et imposition de transmettre les codes LPP détaillés et les ordonnances par les complémentaires pour le tiers payant, problèmes de gestion des bénéficiaires de la nouvelle CSS (Complémentaire Santé Solidaire) par les CPAM (Caisses primaires d’assurance maladie), non-application par les Ocam de la nouvelle nomenclature sur la prise en charge des enfants et sur la prestation renouvellement avec adaptation, etc.

Le Rof et la Fnof dénoncent unanimement l’impréparation des Ocam et de l’assurance maladie. « Si vous, nous, opticien(ne)s, avons fait le nécessaire en nous assurant d’avoir les montures de classe A en magasin et les bons modèles de devis normalisés, ce n’est pas le cas des complémentaires santé et du régime obligatoire », constate André Balbi, président du Rof. « Nous savions qu’une transition compliquée s’annonçait en ce début d’année… Néanmoins, nous ne pouvions pas anticiper l’impréparation totale. Dans certains cas, tout laisse à penser à un blocage manifeste d’ordre politique, au détriment de votre activité. » De son côté, Alain Gerbel, président de la Fnof, fustige « le forcing des complémentaires pour imposer aux opticiens la production des codes LPP et des ordonnances ».

Le bras de fer imposé par les Ocam

Si certains points bloquants, comme l’accès aux portails de tiers payant, semblent se résoudre progressivement, la question centrale des demandes de codes LPP détaillés et des corrections visuelles par les Ocam demeure. Pour rappel, la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a interdit de mentionner sur les devis autre chose que les codes de regroupement. Mais les Ocam, considérant que cette interdiction ne s’applique pas à l’accord de prise en charge et à la facture, continuent de vous demander les codes LPP détaillés et les corrections visuelles.

Selon la Fnof, cet argumentaire des Ocam est « une action concertée visant à faire plier les pouvoirs publics et la Cnil. Dans ce bras de fer entre l’Etat et les complémentaires, il ne faut pas que les professionnels de santé se retrouvent dans une impasse ». Tout en déplorant la position de certains éditeurs de logiciels, Alain Gerbel rappelle les risques encourus par les opticiens dans l’utilisation des codes LPP selon l’article L. 161-29 du code de la Sécurité sociale et l’article L. 233-16 du code pénal.

De son côté, le Rof s’insurge également face à l’attitude des Ocam et dénonce le flou entourant la demande de prise en charge et la facture : « Nous avons sollicité dès juillet 2019 l’avis de la Cnil sur cette question et interpellé tant la Cnam (Caisse nationale d’assurance maladie) que la DGCCRF. Ces 2 administrations avaient alors indiqué attendre l’avis de la Cnil. En décembre 2019, nous avons apporté à cette dernière les éléments factuels démontrant la non-nécessité de transmettre les codes LPP détaillés aux Ocam ».

Appel aux opticiens

Face à cette situation, le Rof encourage ses adhérents à respecter la réglementation sur le devis normalisé, d’ici la publication par la Cnil de son avis. Et surtout, pour André Balbi, « il est primordial que vous continuiez à nous faire remonter par mails tout document émanant des CPAM ou des Ocam (mentions sur le devis, courriers, etc.) pour que les directions centrales prennent conscience de l’ampleur des dysfonctionnements ». Il rappelle que le syndicat collecte depuis le 6 janvier des exemples de blocages, transmis à la Cnam at aux syndicats des Ocam.

Pour sa part, la Fnof, tout en se gardant de donner des instructions aux opticiens, préconise 2 actions : « Demandez à vos éditeurs de logiciels de retirer les codes LPP de tous les documents qui sortent du logiciel, adressez aux Ocam le devis normalisé avec pour seule mention les codes de regroupement. En cas de refus de la complémentaire, prenez contact avec celle-ci et faites-nous parvenir le résultat de vos échanges ainsi que les documents anonymisés concernant les refus de prise en charge que nous adresserons à la DSS (Direction de la Sécurité sociale) et à la DGCCRF ».

Des remontées terrain qui pourraient peser dans la balance lors de la réunion qui aura lieu dans les prochains jours entre la Direction de la Sécurité sociale, les syndicats d’opticiens et les Ocam.