Les start-up promettant un rendez-vous rapide en ophtalmologie fleurissent face aux délais d’attente interminables dans les cabinets des spécialistes. Après Ophta Point Vision, un nouveau modèle a vu le jour à Dunkerque (59) et plus récemment à Agen (47). Il repose sur des optométristes et un réseau d’ophtalmologistes européens en télémédecine. Autant dire que tout cela n’est pas vu d’un très bon œil par les ophtalmologistes…

Changement de paradigme en vue ?

Baptisée Ophta City, cette entreprise promet un rendez-vous en moins de 15 jours (adultes et enfants de plus de 12 ans sans antécédents pathologiques) pour un examen de vue incluant le dépistage des pathologies oculaires. Pour cela, ces centres s’appuient sur des optométristes qui travaillent en collaboration par télémédecine avec des spécialistes européens. Ces derniers analysent les données et envoient un compte-rendu détaillé dans un délai de deux semaines. Si un problème est détecté le patient est alors immédiatement redirigé vers son médecin.

Jérôme Quenor et Régis Poussin, dirigeants d’Ophta City, facturent leurs services 25 euros pour frais d’expertise remboursables par la Sécurité sociale et 35 euros pour frais techniques, soit un total de 60 euros. Les porteurs peuvent toutefois récupérer une partie de leur dépense sous forme d’une réduction s’ils décident d’acheter leur équipement optique sur place. Car, le modèle se différencie par son approche commerciale. La start-up annonce d’ailleurs sur son site web « des tarifs maîtrisés » et une « gamme étendue de montures » avec 600 modèles disponibles parmi plus de 3 000 références. Elle « adapte tous types de lentilles de contact pour un supplément de 60 euros. Ce forfait comprend tous les rendez vous, d’apprentissage de la pose et de suivi ».

Les ophtalmologistes s’interrogent sur la légalité du modèle

Ainsi, ce concept a tout pour faire sauter au plafond les ophtalmologistes, eux qui ne souhaitent pas reconnaître l’optométrie lui opposant que le prescripteur ne doit pas être vendeur. Réunie lundi soir à Agen, une délégation de spécialistes a fait part de ses inquiétudes à l’Ordre des Médecins. Pour le Dr. Vrignaud, ophtalmologistes, « ces gens-là confondent télémédecine et télé commerce. En France, on n'a pas le droit d'être prescripteur et vendeur. Nous aurions un magasin d'optique dans nos cabinets, on nous ferait fermer tout de suite », a-t-il confié à ladepeche.fr en précisant que « la prescription de lunettes n'est qu'une petite partie de notre travail, et on n'est pas là pour pousser à la consommation ».

Selon lui, « on ne peut pas faire un diagnostic juste avec des photos envoyées en Espagne. Nous ne sommes pas là pour défendre notre pré carré, on a malheureusement presque trop de travail en Lot-et-Garonne, on est là pour défendre une certaine idée de la médecine, souligne-t-il. En ophtalmologie, la télémédecine n'est autorisée que pour le dépistage de la rétinopathie diabétique et un médecin doit pouvoir intervenir. Il y aura forcément des suites judiciaires  ».

Deux procédures en référé ont déjà été initiées par le Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof). « La première concernant la disparition de la mention « soins ophtalmologiques » de la devanture a été remportée par les médecins, mais celle pour exercice illégal de la médecine n'est pas encore achevée », précise ladepeche.fr.