Le dernier congrès de la Fnof s’est déroulé le 5 et 6 mai dernier à Biarritz (64). Au programme des échanges et différentes tables rondes : la réforme 100% Santé, la formation et les nouveaux rapports de force entre tous les acteurs du marché. L’occasion pour le syndicat et son président, Alain Gerbel, de réaffirmer sa vision d’un « opticien de santé », dont l’avenir repose sur la valorisation de la prestation et un nouveau mode d’exercice pluri-disciplinaire.
Près d’un an après la signature du protocole d’accord sur la réforme 100% Santé, la Fnof, non-signataire de l’accord, avait choisi comme thème de son congrès : « Un métier, un engagement : l’opticien de santé ». Deux jours d’échanges et de tables rondes pour analyser les effets et implications de la réforme tant sur la formation et le rôle des opticiens que sur la structure du marché dans un contexte bouleversé par sa mise en place en janvier 2020.
Vendre de la prestation
Dès l’ouverture du congrès, Alain Gerbel a posé les enjeux que les opticiens doivent relever dès maintenant : « Le 100% Santé est l’occasion d’un nouveau départ. La réforme sera lourde à porter pour les opticiens. Mais elle nous incite à aller vers un nouvel avenir. » Pour le président de la Fnof, cet avenir passe de manière primordiale par la prestation : « Vendre de la valeur ajoutée ne sera pas suffisant. Il faut valoriser nos prestations de professionnels de santé et, en nous appuyant sur les opportunités en termes de formation, nous diriger vers de nouveaux modes de rémunération. »
Ces derniers pourront reposer sur un mode d’exercice pluridisciplinaire dans et hors le magasin : « L’opticien doit sortir de son magasin. Aller dans les écoles, les entreprises et les Ehpad. » Une mobilité pour laquelle les opticiens profondément ancrés dans leur zone de chalandise ont toute légitimité « La loi sur la réfraction par les opticiens en Ehpad, votée en janvier dernier, présente toutefois un danger : elle tend à instaurer un nouveau système de distribution. Il ne faut pas que ce nouveau mode d’exercice se transforme en simple stratégie de croissance pour certains opticiens. Il faut définir de nouvelles règles d’exercice », précise Alain Gerbel. Et d’ajouter : « Tout cela ne pourra se faire que s’il y a engagement de formation. Les nouveaux modes de rémunération reposent sur la formation professionnelle, initiale et continue. »
Formation, la clé de voûte de l’avenir des opticiens
Ce thème majeur a été abordé lors de 2 tables rondes, l’une sur les travaux déjà effectués par le Cnof (Collège national des opticiens de France) dans le cadre de la réforme de la formation avec passage à un cursus en « 2+1 », l’autre sur les nouvelles orientations du DPC (Développement professionnel continu) à partir de 2020.
Michèle Lenoir-Salfati, directrice générale de l’ANDPC, l’agence nationale qui gère le DPC, a rappelé son obligation pour tous les professionnels de santé : « Depuis 2017, 724 actions de DPC ont été déposées auprès de l’agence. Il s’agit surtout de formations théoriques. Mais augmenter le niveau de connaissances ne suffit pas. Nous souhaitons à l’avenir que se développent les évaluations en situation des pratiques professionnelles. » Trois nouvelles orientations seront publiées en juin prochain : optimisation des capacités visuelles au travail, vision de l’enfant et vision de la personne âgée. « Nous souhaitons concevoir davantage d’actions pluri-professionnelles engageant les ophtalmologistes, les orthoptistes et les opticiens », a indiqué Michèle Lenoir-Salfati.
100% Santé : l’occasion de modifier les rapports de force sur le marché
Autre fil rouge du congrès : le devenir des réseaux de soins avec la réforme 100% Santé, alors que ces derniers lanceront leur appel à candidature aux opticiens à partir de l’été. Pour Alain Gerbel, « les opticiens ont l’occasion de trouver une solution pour sortir du « pragmatisme économique » des réseaux de soins. Ils ne sont ni une malédiction ni une obligation. Et le 100% Santé met à mal leur rôle. »
Dans un marché divisé en 3, marché 100% Santé, marché piloté par les réseaux de soins, marché libre, à quel équilibre des forces doit-on s’attendre ? Pour Alain Gerbel, la réponse est sans ambiguïté : le talon d’Achille des réseaux, c’est l’adhésion des opticiens et cette adhésion ou non peut empêcher les réseaux d’exister. « Par ailleurs, nous devons absolument sortir de la logique du remboursement et du tiers-payant », a-t-il martelé. « Le premier réseau, c’est le tiers-payant et au-delà même des réseaux les plateformes de gestion. Si on ne règle pas cette question, le marché libre n’existera pas.»
Dans cette logique, la Fnof rappelle qu’elle a engagé, le 6 janvier dernier, aux côtés de 4 opticiens une procédure à l’encontre de Viamedis auprès du Tribunal de grande instance de Paris pour refus de tiers payant en défaut d’exécution de la convention Cnam.