La caisse primaire d'Assurance Maladie de Charente (CPAM) a porté plainte suite à des pratiques illégales présumées au centre Laser Vision à Soyaux.

Une orthoptiste aurait employé des opticiens-optométristes pour effectuer des actes médicaux réservés aux orthoptistes, et ce pendant près de deux ans. Une pratique frauduleuse qui aurait permis aux actes réalisés d'être remboursés par la Sécurité Sociale, puisque facturés sous le numéro professionnel d'un orthoptiste.

Nous avons interrogé Thibaud Thaëron, président de l'Association des Optométristes de France (Aof) et Vincent Dedes, président du Syndicat National des Ophtalmologistes de France (Snof). Le syndicat national des orthoptistes s'est exprimé dans un communiqué.

 

Thibaud Thaeron, président de l’AOF :

« La fraude réside dans le fait que ces opticiens optométristes ont réalisé des actes réservés aux orthoptistes. Qu’ils soient en cabinet d’ophtalmologie ou d’orthoptie, les opticiens ne sont pas autorisés à réaliser un examen de pression intra-oculaire, qu’ils aient le statut d’assistant médical ou non.

Cette situation en Charente met en lumière des choses que nous connaissons déjà : il y a un manque d’ophtalmologistes et d’orthoptistes dans certaines régions de France. Bien que cette pratique ait rendu service à de nombreux patients, elle est en dehors du cadre règlementaire et semble avoir été tolérée par les autorités locales pendant 2 ans.

Nous condamnons cette pratique. Cependant, cela met en lumière le rôle de l'opticien optométriste et ses compétences dans la santé visuelle. Nous continuerons de le mettre en avant et de demander aux autorités de légiférer pour s’appuyer sur nos compétences. »

 

Vincent Dedes, président du Snof :

« Deux choses sont illégales dans cette affaire : l’utilisation de cotations orthoptiques par des opticiens, et le détournement de protocole.

En effet, ils auraient détourné le protocole de coopération type RNM (Muraine-frêté) ne fonctionne qu’entre des orthoptistes et des ophtalmologistes et seulement auprès de patients bien définis, entre 16 et 50 ans, déjà suivis par un ophtalmologiste, sans pathologies et seulement pour un renouvellement optique. On se doit d’assurer la continuité des soins, autant que possible sur le même territoire.

Les actes exacts qui ont été réalisés ne sont pas connus, et n'oublions pas la présomption d'innocence. Mais il est clair que, sous couvert d’accès aux soins, cette pratique peut avoir un motif financier non négligeable. On sait que l’orthoptiste qui employait des opticiens cotait à 6 endroits différents.

Il est surprenant qu’un médecin se soit prêté à ce genre de pratiques en signant les ordonnances, d'autant plus qu'il n’y a pas de difficultés à accéder aux lunettes en France, qu'on soit situé en zone tendue ou non.

Il faut reconnaitre qu'aujourdhui, on a tellement poussé le cadre règlementaire qu’il devient compliqué à comprendre, pour les patients comme pour les professionnels de santé. »

 

Syndicat national autonome des othoptistes (Snao) :

Dans un communiqué, le Snao rappelle qu'il « tire la sonnette d'alarme depuis des années sur la fraude et l'exercice illégale de l'orthoptie ». Le syndicat constate que « de nombreux élus locaux et instances ont fermé les yeux sur ces problèmes » malgré les problèmes signalés :

  • Fraude et exercice illégal ;
  • Utilisation abusive de titres ;
  • Diplômes étrangers non reconnus ;
  • Télémédecine non régulée.

Dans le cas du Laser Vision de Soyaux, le Snao s'interroge car « certains élus locaux soutiennent ces initiatives », ce qui pose la question de savoir si « les Français sont prêts à mettre leur santé en péril pour accéder plus rapidement aux soins ? »

« Le Snao insiste sur l'importance de ne pas sacrifier la sécurité pour la rapidité, et appelle à une action urgente pour réguler et protéger la santé des Français et la professions des orthoptistes. »