Hier, mercredi 8 janvier, la 17e chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Paris a entendu les différentes parties dans l'affaire opposant la société Santéclair au Groupe All et au Snof (Syndicat national des ophtalmologistes de France). « La société demanderesse, qui assiste les consommateurs dans le domaine de la santé, reproche des faits de dénigrement sur trois supports, dont notamment une gazette mise à disposition des patients chez les opticiens et les ophtalmologistes, et qui concerne la loi Le Roux », a expliqué la magistrate en charge de l'audience. Rappelons qu'en octobre dernier, la centrale d'opticiens et le syndicat de spécialistes s'étaient unis pour co-signer une campagne de communication ayant pour objectif d'informer les consommateurs des implications des réseaux.
Deux phrases contenues dans la gazette sont pointées du doigt :
- « Professionnels de santé ou professionnels de la finance ? Qui des deux doit choisir vos produits de santé ? » ;
- « Santéclair et les réseaux de soins en général, diminuent la qualité des produits de santé proposés tout en maintenant leurs tarifs de cotisation ».
« Santéclair considère que les défendeurs ont engagé une campagne de dénigrement à son encontre, a continué la magistrate. De leur côté, les défendeurs ont fait valoir que leur objectif est de défendre la qualité des soins ».
Pour Santéclair, son activité est largement critiquée
Pour Maître Francis Pudlowski, avocat de la plateforme de santé, « c'est bien l'activité de Santéclair qui est critiquée. Cette campagne de dénigrement jette le discrédit. Parmi toutes les sociétés concernées, seule la société Santéclair est citée par la Gazette. (...) Contrairement au document mensonger diffusé par le Snof et le Groupe All, beaucoup de professionnels sont intéressés par ces réseaux de soins. (...) L'UFC-Que Choisir, la Cour des comptes et le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) ont eux aussi expliqué l'intérêt des réseaux de santé pour les patients ».
« Pourquoi mentir en disant que les principaux actionnaires (de Santéclair, ndlr) sont des sociétés financières, a continué l'avocat. Ce n'est pas un épicier tunisien illettré qui a fait ce document. C'est signifier ‘on pense qu'à vous prendre votre argent'. Là, nous sommes dans du dénigrement car on manipule les faits ».
Enfin, Maître Pudlowski a demandé 300 000 euros de dommages-intérêts, soit « 1 euro par exemplaire manifestement diffusé », ainsi que l'interdiction de diffusion du document, la publication judiciaire sur Internet et sur trois organes de presse.
Santéclair n'assure pas la qualité des produits de santé pour le Groupe All
Du côté de la défense, l'avocat du Groupe All, Maître Jean-François Ségard, a estimé que « Santéclair mène une véritable offensive en direction du grand public en disant que ‘les opticiens sont des voleurs'. Il s'agit là d'un extrait d'une interview de Marianne Binst (directrice générale de Santéclair, ndlr) dans la grande presse ».
Concernant la qualité des produits de santé, Maître Ségard a expliqué que « Santéclair a mis en place des remboursements qui vont en diminuant en fonction du caractère technique et novateur du verre ». Selon lui, l'objectif pour la plateforme de santé est de dire : « Chez Santéclair, il n'y a pas de reste à charge mais ce n'est pas moi qui fait l'effort car les cotisations restent inchangées. Santéclair fait ça sur le dos des professionnels de santé. Un mécanisme né, démontré, indiscutable et revendiqué par Santéclair ».
« Un client, avec le conseil de Santéclair pour une meilleure offre et pas de reste à charge, peut s'attendre au meilleur produit. Non, il aura le meilleur prix pour Santéclair, a-t-il continué. (...) C'est un système dans lequel l'opticien n'a pas le droit de parler. Un opticien n'est pas tout à fait libre de sa prescription car il n'est pas tout à fait libre du remboursement. (...) Nous ne dénigrons pas, nous remettons sur la place une vérité que vous ne contestez pas mais que vous empêchez d'être dite ».
Pour le Snof, Santéclair « fait prévaloir l'intérêt financier à l'intérêt de santé »
Pour terminer, Maître Jérôme Cayol, avocat du Snof, a invoqué la vérité des faits exposés dans la gazette diffusée. « De plus, ce n'est pas du dénigrement d'être considéré comme un professionnel de la finance ». Selon lui, le syndicat « n'a pas d'intérêt direct dans cette discussion sur les réseaux et la loi Le Roux. Son seul intérêt, c'est dire ce qu'il pense être bon pour la santé visuelle des Français ».
« Santéclair n'est pas le bienfaiteur qu'on décrit. Elle fait du lobbying et la promotion des réseaux, a-t-il insisté. (...) Ce que nous critiquons, c'est un comportement, qui est condamnable car il fait prévaloir l'intérêt financier à l'intérêt de santé ». Maître Cayol a également mis en avant les dessins mis en ligne par la plateforme de santé sur ses différents sites Internet (y compris les réseaux sociaux). Il a considéré que « les critiques faites dans ces dessins envers les médecins sont beaucoup plus graves que les critiques qui sont faites à Santéclair ».
Enfin, l'avocat « ne voit pas comment il pourrait y avoir dénigrement entre un syndicat de médecins, qui ne fait que donner son opinion dans un débat public, et une société qui ne fait que promouvoir les réseaux. Santéclair ne vend pas de produits de santé », a-t-il conclu.
Le jugement sera rendu en février.
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