Revenir sur la Loi Le Roux et réformer la formation des opticiens, voici l'objectif affiché d'une nouvelle PPL déposée hier au Sénat. Annoncée en exclusivité lors de notre débat sur l’organisation de la filière au Silmo 2016, elle est présentée par les parlementaires UDI Olivier Cigolotti (Haute-Loire) et Pierre Medevielle (Haute-Garonne).

Le texte (document disponible ci-contre) se donne pour objectif de « favoriser l'accès aux soins oculaires sur l’ensemble du territoire par la réorganisation de la filière de formations en santé visuelle ». « Selon l'Assurance maladie, il faut 85 jours en moyenne en France avant de pouvoir consulter un ophtalmologiste. En 2014, nous étions à 77 jours, exposent les auteurs. Ces délais ne sont pas acceptables en termes d'accès à la santé visuelle, de gestion de l'urgence, de qualité de soins et vont à l'encontre des principes de santé publique ».

Une qualification de « cadre en santé visuelle »

Pour répondre à cette problématique, les deux sénateurs souhaitent « repenser l'organisation de cette filière de manière à garantir durablement l'accès aux soins » et « créer les conditions d'un travail collaboratif plus harmonieux entre professionnels ». Ils proposent de :

  • porter à 3 ans la formation des opticiens dans le cadre du schéma LMD (Licence-Master-Doctorat) pour « élargir leurs champs de compétences et permettre ainsi à des professionnels formés d'exercer leur art en complémentarité avec les ophtalmologistes ».
  • créer une formation « Cadre en Santé Visuelle » de type Master à laquelle les orthoptistes et opticiens-lunetiers pourraient accéder. « Les masters en optométrie pourraient également décider de rejoindre la formation », ajoutent les parlementaires.

Si les conditions d’accès à cette formation seraient précisées par voie réglementaire (décret, arrêté), les sénateurs précisent que « lors de la troisième année de Licence, les étudiants qui souhaitent poursuivre vers le « master cadre en santé visuelle » devront choisir des unités d'enseignements supplémentaires :

  • les opticiens-lunetiers auraient à acquérir des connaissances cliniques solides ;
  • les orthoptistes auraient à acquérir des bases techniques ».

Une fois les 5 années de formation achevées, le diplômé pourra effectuer les actes définis dans le Code de la santé et dans les décrets d'actes.

Les « délégations ne peuvent se réaliser que si les conditions de confiance professionnelle entre le délégant et le délégataire sont réunies, ajoutent les auteurs du texte. Ainsi, il sera possible de dégager du temps médical pour la prise en charge d’affections ophtalmologiques plus complexes, de réduire les délais d’attente des consultations sur le territoire et enfin d’améliorer l’efficacité de la prise en charge de certaines pathologies chroniques ». Bien entendu, « l’ophtalmologiste reste le pivot et le maître d’œuvre de la filière de santé visuelle ».

« Non aux réseaux de soins fermés en optique ! »

En dernier lieu, les sénateurs profitent de cette PPL pour revenir sur la Loi Le Roux autorisant les réseaux fermés pour les seuls opticiens. Considérant que ce type de réseau « génère à grande échelle des distorsions de concurrence », ils demandent que « les conventions de partenariat soient accessibles à tous les professionnels qui le demandent » et que « ces pratiques soient encadrées afin que soient effectivement garantis le principe du libre choix par l’assuré de son opticien, le principe du libre choix par l’assuré de son équipement, le principe du libre reste à charge.

« Sans entrer dans les aspects relevant du domaine réglementaire ou du contrat, la présente proposition de loi définit des solutions pour remédier aux difficultés actuelles afin de favoriser l’accès aux soins oculaires sur l’ensemble du territoire par la réorganisation et l’amélioration de la filière de santé visuelle », concluent-ils.

Notons que cette nouvelle PPL fait suite à la proposition de loi déposée en 2014 par le sénateur Ronan Kerdraon et qui n’a jamais été mise à l’ordre du jour des séances publiques du Sénat. Peut-être en sera-t-il autrement pour ce nouveau texte ?