Président du Syndicat national autonome des orthoptistes (SNAO) depuis 2009, Laurent Milstayn n'a pas souhaité renouveler son mandat et a cédé sa place à Mélanie Ordines. Cette dernière a été élue à l’unanimité le 3 juin lors du conseil d’administration du syndicat. Entre un mandat plus long que prévu, ses fiertés et son unique regret, Laurent Milstayn revient pour Acuité sur les 12 années écoulées.

Acuité : 12 ans, ç’a été un long bail…

Laurent Milstayn : J’avais pourtant promis à ma femme de ne pas faire plus de 5 ans ! En 2009, c’était une opportunité qui s’ouvrait à moi au moment de remplacer Marie-Hélène Abadie, qui a sorti les orthoptistes de l’anonymat et des cabinets d’ophtalmologistes. J’étais syndicaliste depuis longtemps mais n’avais jamais eu de haute responsabilité. Comme la politique syndicale m’avait toujours passionné, c’était l’occasion !

Pourquoi êtes-vous finalement resté plus longtemps qu’initialement prévu ?

Avec Maria Plaza, ma secrétaire générale, nous avons formé un binôme sur la durée. C’est elle qui a décidé d’arrêter en premier, en septembre dernier. Je me suis alors rendu compte que j’avais derrière moi une équipe jeune et soudée, et que les objectifs que nous nous étions fixés il y a 12 ans ont été remplis. J’ai estimé qu’il était temps de m’effacer et de passer les rênes. Je reste là si elle a besoin de moi, mais cette équipe devrait continuer dans les grandes lignes que nous avons mises en place.

De quoi êtes-vous le plus fier ?

Beaucoup de choses ! Nous avons été confrontés à une nouvelle donne de la filière : les délégations de tâches, les coopérations interprofessionnelles, le fait que le médical primait sur tout… Les politiques ont voulu partager entre médicaux et paramédicaux, et nous avons surfé sur cette vague pour valoriser les compétences des orthoptistes dans la filière, en les ratifiant par des textes officiels.

Aujourd’hui, être orthoptiste, c’est avoir beaucoup de compétences légales sous la main et pouvoir au gré de sa vie et de sa carrière naviguer entre ces différentes compétences. La profession a acquis de plus en plus d’autonomie, entre le protocole Muraine ou la possibilité de renouvellement par exemple. J’espère que cette autonomie ira encore plus loin, toujours en interdépendance dans la filière.

Peut-être que les orthoptistes seront un jour les sages-femmes de la filière, des professionnels médicaux à compétences définies qui prendront en charge tout une partie de la population. Comme un socle pour les patients aux pathologies stabilisées, quand l’ophtalmologiste restera lui sollicité pour son expertise.

Y a-t-il quelque chose que vous ne referiez pas ?

Non je ne pense pas. En revanche, je porterais sans doute plus d’attention sur les dérives monétaires de ce qu’on a réussi à obtenir de la Cnam : le fait de ne plus avoir de temps minimum (30 minutes, ndlr) à consacrer à chacun de nos patients pour effectuer un bilan. Nous sommes parvenus à faire disparaître ce temps minimum de la nomenclature, mais certains s’en sont servi pour optimiser au maximum leur rémunération de leur centre de santé. Cette mesure a profité aux orthoptistes libéraux mais surtout aux structures ophtalmologistes employeurs pour grossir leur CA sans valeur ajoutée dans la prise en charge de leur patient. Le SNAO essaye de freiner cette voracité avec la Cnam, mais rien n’a abouti pour le moment.

Un dernier mot ?

Oui, je finirai par vous remercier, Acuité, car je n’oublierai pas que vous avez été parmi les premiers à m’accueillir et à vous intéresser à l’orthoptie. Je remercie aussi mes partenaires politiques, avec qui on s’est entendu pour certains, ou pris le bec pour d’autres. Nous nous sommes parfois heurtés les uns aux autres, mais cela fait partie du jeu syndical : chacun travaillait pour son camp. Ce jeu est fait de compromis, de combats et d’accords. Je souhaite enfin le meilleur à ma successeure.