Le regroupement des opticiens à domicile (Road) a accueilli favorablement l'annonce de la généralisation de l'expérimentation qui permet l'intervention des opticiens en Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (Ehpad).
« Une mesure longtemps défendue par l'association et ses membres, engagés depuis 2022, sans compensation financière », a rappelé le Road dans un communiqué.
Cette mesure - l'une des deux 2 qui concernent directement les opticiens-lunetiers - est intégrée au pacte de lutte contre les déserts médicaux présenté par le Premier ministre François Bayrou le 25 avril 2025.
Rappelons que ce dernier avait signé le 31 décembre 2024 un décret prolongeant la durée de l'expérimentation d'un an.
Une décision qui reflètait « un manque de décisions politiques sur des sujets pourtant cruciaux pour la santé visuelle des populations fragiles », selon le président du Road, Matthieu Gerber.
Quels constats ?
Dans un communiqué le Road rappelle que près de 4 résidents sur 10 en Ehpad (38%) souffrent d'un défaut visuel faute d'équipement adapté.
Pour l'association professionnelle, l'expérimentation a démontré :
- La pertinence de la mobilité des opticiens pour répondre aux besoins des résidents d’EHPAD ;
- La possibilité de réaliser en toute sécurité et avec la même qualité des examens de réfraction hors du cadre du magasin ;
- L'importance de proposer un accès facilité aux soins visuels pour les personnes âgées.
Mais elle a aussi révélé des limites :
- La nécessité d'une prescription médicale pour garantir la prise en charge financière des équipements optiques par les régimes obligatoires et complémentaires ;
- Le besoin crucial d’un suivi par un médecin ophtalmologiste pour détecter et prévenir les pathologies oculaires liées au vieillissement.
Le Road appelle à aller plus loin en « autorisant les opticiens en mobilité à réaliser sur tous les lieux de vie des personnes fragiles des examens complémentaires (fond d’œil, mesure de la pression intraoculaire, imagerie du segment antérieur), analysés ensuite en télé-expertise (asynchrone) par des médecins ophtalmologistes, garantissant ainsi un diagnostic médical sécurisé et un parcours de soin adapté ».
Objectif : faciliter l'accès aux soins visuels pour les personnes isolées ou fragiles sur leurs lieux de vie via une meilleure collaboration opticiens-ophtalmologistes.
Pour Matthieu Gerber, « ce pacte est une avancée et adresse enfin un signal de confiance aux opticien. Leur rôle essentiel dans l’amélioration de l’accès aux soins est aujourd’hui pleinement reconnu. Face à ce constat, la généralisation de l’expérimentation doit aller plus loin ».
Il appelle le gouvernement et le ministère de la Santé et de l’Accès aux soins « à engager des actions concrètes et efficaces pour lutter contre le non-recours à la santé visuelle en s’appuyant sur les opticiens, disponibles en nombre suffisant sur le territoire, pour intervenir directement auprès des populations isolées et fragiles ».
La réalisation des examens complémentaire type imagerie du fond d'œil et du segment antérieur, tension oculaire et même les réfractions hors local commercial est déjà de la compétence des orthoptistes et des initiatives locales se font déjà dans différentes régions avec cette même liste d'examen complémentaire faites par ces derniers dans des ephad et en bonus sans l'intention / le besoin de vendre pour rentabiliser.
Notre démarche ne vise en aucun cas à remplacer ou à concurrencer les orthoptistes. Nous défendons au contraire une approche complémentaire et pragmatique, fondée sur la coordination des soins, la délégation de compétences encadrée et la valorisation des actes pour répondre aux besoins insatisfaits ou non adressés d’une partie de la population.
La réalité est que l’accès à la santé visuelle reste inégale sur le territoire, en particulier pour les personnes âgées, en situation de handicap ou isolées géographiquement. Si les orthoptistes ont obtenu des délégations pertinentes, ils demeurent aujourd’hui trop peu nombreux malgré la progression de leur effectif ces 5 dernières années (environ 6 000 professionnels selon les données ADELI au 1er janvier 2023), travaillent pour plus de la moitié sur une activité en temps plein en cabinet et sont concentrés sur certains bassins de population (23 % en Île-de-France), ce qui limite drastiquement les capacités d’intervention régulière à domicile, sur les territoires ruraux, ou en établissements médico-sociaux.
À titre d’exemple, parmi les 7 500 EHPAD en France, combien bénéficient actuellement de déplacements réguliers d’orthoptistes ? Cette couverture insuffisante laisse de nombreux patients sans solution concrète pour leur suivi visuel. Il en est de même pour tous les établissements médico-sociaux (grand-âge et handicap).
Les opticiens, de par leur maillage territorial (plus de 42 000 professionnels), leur expertise technique et leur proximité avec les patients, leur volonté de monter en compétence, peuvent utilement s’intégrer dans des parcours de soins coordonnés avec les ophtalmologistes et orthoptistes. Sous forme de protocoles validés et encadrés, ils peuvent contribuer à la réalisation d’examens complémentaires, en relation directe avec les médecins, sans confusion de rôle, ni risque de dérive commerciale compte tenu du caractère asynchrone des échanges.
Notre objectif est simple : faciliter l’accès à l’expertise médicale pour des publics fragiles, amener la prévention au cœur des territoires, et renforcer la coopération entre opticiens et ophtalmologistes.
Nous sommes convaincus qu’opposer les 3-O n’apportera pas de solution durable. En revanche, encourager une meilleure coordination des compétences, en s’appuyant sur les forces de chacun, sur l'IA et le numérique, servira avant tout les patients, leurs aidants, et les professionnels du Grand Âge et du handicap qui, aujourd’hui, se retrouvent souvent sans réponse à leurs besoins essentiels.
Restons ouverts au dialogue et à la construction de solutions collectives.
Cordialement