Les 1ers "Etats généraux de la Vue" se sont ouverts ce matin à l'Académie de Médecine de Paris, dans le contexte polémique d'un possible déremboursement par la Sécurité sociale des équipements optiques. Réunissant les dirigeants du Snof (Syndicat national des ophtalmologistes de France), de la SFO (Société Française d'Ophtalmologie) et divers médecins, cette rencontre donne le coup d'envoi d'une série de travaux qui se poursuivront jusqu'au Congrès de la SFO (10-14 mai 2008), avec un triple objectif : "intégrer la vue dans le domaine de la santé publique, souligner le rôle primordial de l'ophtalmologiste pour tout ce qui concerne le système visuel, et donner la parole aux patients, par le biais d'un forum sur Internet" explique Jean-Luc Seegmuller, Président du Snof.

Déremboursement : attention danger !

Joseph Colin, Président de la SFO, a ainsi dressé un panorama des ‘surspécialités' qui font de l'ophtalmologie d'aujourd'hui une "spécialité de pointe" et "unie grâce à sa société savante et à son syndicat, qui constituent une force vive auprès des instances". Thierry Bour, Responsable des études de santé publique au syndicat, a pour sa part dénoncé le projet gouvernemental de sortir les équipements optiques de l'Assurance maladie. "18% des consultations pour lunettes débouchent sur la découverte d'une pathologie. L'obligation de passer par l'ophtalmologiste, au moins tous les 3 ans, pour obtenir un équipement, permet de réaliser régulièrement des dépistages primordiaux. Sans cette obligation, nous serions contraints d'organiser des actions de dépistage beaucoup plus lourdes" explique-t-il.
Guy Aflalo, Secrétaire Général du Snof, a pour sa part insisté sur une "l'autre menace" pesant sur l'ophtalmologie : la pénurie de spécialistes. La situation est pour l'heure bien gérée - "80% des urgences sont traitées dans les 24 heures, le suivi des patients est assuré, seuls 10% des situations sont insatisfaisantes" - mais risque de devenir problématique au regard du vieillissement de la population. En tête de liste des solutions plébiscitées par les ophtalmologistes : l'augmentation du numerus clausus et le ‘travail aidé'. "L‘ophtalmologiste travaillant seul dans son cabinet va devenir un image du passé, la délégation de tâches aux orthoptistes va s'amplifier" explique Lionel Leroy, Administrateur du syndicat.

Délégation de tâches aux opticiens : des résultats mitigés

Si le Snof se montre "satisfait" des premiers résultats des délégations aux orthoptistes, il se montre plus sceptique sur l'extension des compétences des opticiens, mises en oeuvre il y a un an. "Beaucoup d'opticiens sont honnêtes, mais les problèmes de non-conformité à la législation sont trop importants. Nous voyons des publicités sur les examens de vue, des renouvellements sans ordonnance ou sur la base d'une prescription obsolète. Les médecins ne sont pas prévenus systématiquement des changements de correction et certains opticiens ont de réelles difficultés dans leur coeur de métier" dénonce Jean-Bernard Rottier, Vice-Président du Snof. "Avec ces nouvelles formes de coopération, les opticiens se sont créé un ‘droit de substitution' pour les lentilles et leurs solutions d'entretien. Ils proposent de plus en plus de MDD (marques de distributeurs), et c'est illégal. Le monopole est justifié si un professionnel est nécessaire pour délivrer le produit prescrit. Nous demandons donc soit l'arrêt de la substitution, soit la levée du monopole. Nous demandons également la liberté d'association entre des groupes d'ophtalmologistes et des groupes d'opticiens respectant la loi" a-t-il poursuivi.

Aujourd'hui, le Snof attend, sur son site www.snof.org/egv, les contributions du public et des professionnels de santé sur l'ensemble de ces questions relatives à la gestion de la santé visuelle. Les remarques seront compilées dans un livre blanc. "Nous pourrons ainsi mettre les pouvoirs publics en face de leurs responsabilités, faire avancer les choses et nous battre contre des a priori administratifs. Cette démarche nous donnera les armes pour lutter contre les pouvoirs publics, qui négligent la santé visuelle et refusent d'apporter les moyens humains et matériels indispensables" espère Jean-Luc Seegmuller.