L’arrêté du 28 avril 2017 relatif aux nouveaux devis normalisés pour l’optique et l’audioprothèse, instaurés par la loi Macron, est paru hier, jeudi 4 mai au Journal Officiel. Les modèles, qui entreront en vigueur au 1er janvier 2018, prévoient notamment de distinguer le prix de chaque produit et prestation. Nous avons souhaité vous donner l’avis des syndicats*.

Alain Gerbel, président de la Fédération nationale des opticiens de France (Fnof)

« Ce texte rassure, sécurise, et va dans le sens d’une volonté de la profession de préciser ce qu’elle fait, comment elle travaille et surtout de mettre en place une transparence totale. Le nouveau devis démontre que l’optique est une affaire de professionnels. Il faudra renforcer les mesures, mais c’est un début très positif. Contrairement aux déclarations de certains syndicats, on ne fait pas de la vente en l’état, et comparer l’achat de lunettes à une machine à laver, où il n’y a pas de main-d’œuvre, n’est pas raisonnable.

Avec ce nouvel arrêté, chaque opticien va détailler lui-même sa prestation et rentrer dans le détail. Une manière de montrer sa différence ! On était dans un système d’uniformisation où l’ensemble des prix par les réseaux était commun sur tout le territoire, quel que soit le professionnalisme de l’opticien. Pour cette raison, cet arrêté est colossal. Le devis va également amener des changements importants au niveau des pratiques, le gratuit n’existe pas. Si l’opticien affiche une prestation nulle en magasin, la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) considèrera qu’il s’agit d’une fraude et demandera des explications.

Autre point essentiel : la reconnaissance de l’opticien optométriste. C’est le début d’une nouvelle profession. S’ensuivront notamment de nouvelles formations, la réingénierie du diplôme d’opticien et de nouveaux domaines d’activités.

Concernant la question du remboursement par les complémentaires de la prestation, nous sommes dans l’article L.165-9, le devis n’est plus dans le code de consommation mais dans celui de la Sécurité sociale, les Ocam doivent rembourser la prestation. Cet arrêté montre d’ailleurs que les complémentaires ont l’obligation de communiquer les garanties, et dans le cas des contrats collectifs, l’entreprise doit indiquer les conditions du contrat à ses salariés.

La Fnof a souhaité redéfinir les contours d’une profession et valoriser le métier d’opticien. Nous y sommes parvenus. Je me félicite de l’ensemble du soutien apporté par la filière, à commencer par les fabricants ».

Ludovic Mathieu, président du Groupement des Industriels et Fabricants de l'Optique (Gifo)

« De nouveaux jalons sont posés dans la reconnaissance du métier de l’opticien. Le Gifo s’est mobilisé depuis plus d'un 1 an au sein de ses commissions pour obtenir un délai supplémentaire, une plus grande intelligibilité des documents remis aux consommateurs, le recours au code GTIN (Global Trade Item Number) comme traceur des montures (un numéro unique pour chaque modèle de lunettes en 14 caractères), et s’assurer que le texte soit compatible avec les exigences du futur règlement européen relatif aux dispositifs médicaux. Nous sommes satisfaits que nos propositions aient été dans l'ensemble retenues.

Surtout, cet arrêté répond à 3 attentes importantes :

  • un renforcement de la traçabilité des produits ;
  • une meilleure information du porteur avec plus de repères pour éclairer son choix permettant une concurrence plus équitable et plus saine ;
  • une reconnaissance et une valorisation du métier de l'opticien de nature à permettre son évolution par le haut et l'expression des différences dans la pratique professionnelle.

Pour la 1ère fois, le travail de l’opticien est reconnu avec sa capacité à transformer les produits, à prendre des mesures, à conseiller... On sort de la dangereuse illusion de la vente en l'état et de la fausse image de gratuité. L’opticien doit saisir ces opportunités pour enrichir son métier, développer ses services pour au final apporter plus de satisfaction aux porteurs. C’est incontestablement le début d’un nouveau chapitre dans la profession. Désormais, la prestation de l'opticien sera connue et reconnue par le consommateur.

Restons vigilants tout de même, la mise en œuvre de ces évolutions ne doit pas conduire à une réduction de la base de remboursement ».

Yannick Dyant, président de l'Association des Optométristes de France (AOF)

« Cet arrêté n’est pas une révolution. Il y a eu beaucoup de craintes sur le sujet, mais au final, je retiens que quelques changements. Les points positifs : la valorisation des services tels que l’examen de vue, l’apprentissage et la pose des lentilles de contact… A tort, certains opticiens ne le faisaient pas jusqu’à présent.

La nécessité de noter les remboursements des assurés va forcer les complémentaires santé à transmettre l’intégralité des données à l’opticien. Certaines refusaient de communiquer cette information.

En revanche, l’objectif du ministère de rendre plus lisible le devis n’est pas forcément rempli. Avec les produits spécifiques en MDD, la comparaison ne sera pas aisée pour le client.

Autre point négatif : l’obligation de refaire un devis pour un renouvellement de lentilles de contact. C’est un non-sens. De plus, il est essentiel que les logiciels des opticiens soient mis à jour. Pour certains petits éditeurs, cela risque d’être compliqué ».

*L’UDO, le Snor et l’Unsaf s’exprimeront la semaine prochaine.