Signé le 19 décembre par la majorité des syndicats de salariés (Unsa, CFDT, CFTC, CFE-CGC, sans la CGT) et la FNOF, l'accord sur la revalorisation des salaires minimaux de la branche optique-lunetterie (IDCC 1431) ne pourra pas entrer en vigueur : le ROF annonce s'y opposer.
La hausse du salaire minimal prévue dans ce texte à hauteur de 3% pour les opticiens et 2,5% des collaborateurs non-diplômés est jugée trop importante par le Rof et estime que « l’accord apparaît déséquilibré ou incompatible avec l’intérêt général de la profession ».
Cette année, les syndicats de salariés revendiquaient une hausse générale de 3,5% et une évolution de la prime d’ancienneté, restée inchangée. Les propositions patronales, elles, ont divergé.
Deux lignes patronales, deux grilles différentes
D’un côté, le ROF (organisation patronale majoritaire, plus de 80% de représentativité) a mis sur la table une revalorisation jugée « très largement insuffisante » par les syndicats : +2,03% pour les opticiens et +1,68% pour les non-diplômés, alors que la grille actuelle « date de plus de deux ans » et que l’inflation a continué de peser sur le pouvoir d’achat.
De l’autre, la FNOF (représentant près de 20% des entreprises de la branche) a proposé une hausse plus marquée : +2,5% sur tous les niveaux pour les non-professionnels de santé, et +3% pour les opticiens (avec un premier niveau à +3,30%). Une proposition qui, selon Frédéric Boulle (UNSA), reste « inférieure à ce que nous demandions » : « mais après discussion entre tous les syndicats, nous étions satisfaits de la proposition de la FNOF », explique-t-il, rappelant que la CGT n’a pas signé.
La FNOF explique sa position : « Nous sommes restés volontairement en dessous de la demande des organisations syndicales, en expliquant que le dernier trimestre 2025 est catastrophique économiquement pour les opticiens, le contexte fiscal et réglementaire est extrêmement incertain », rappelant néanmoins qu’une revalorisation restait indispensable, la dernière datant de deux ans.
Le nœud du problème : l’extension… et l’opposition du ROF
Dans son communiqué, le ROF « respecte » la mise à signature de l’accord FNOF, mais insiste sur son droit d’opposition lorsqu’un texte est jugé « déséquilibré ». Dans son communiqué, « le ROF déplore que sa proposition d’accord, prenant pourtant en compte la plupart des demandes des organisations syndicales de salariés, n’ait pas été accueillie positivement ». Les syndicats de salariés estiment visiblement à l'inverse que la plupart de leurs demandes n'ont pas été prises en compte par le ROF, puisqu'ils n'ont pas validé sa proposition.
Côté FNOF, en interview, son président Hugues Verdier-Davioud assure que le calendrier a été fixé en CPPNI mi-octobre 2025, en présence d’une représentante du ministère du Travail, et reproche au ROF d’avoir transmis sa proposition « le lendemain » d’une première demande salariale, « sans attendre » les 4 autres. « C’est un signal désastreux envoyé aux autres syndicats », déplore-t-il. Une méthode qu’il juge contraire à l’esprit même de la négociation collective. Il rappelle également l’échec des négociations de l’an passé, marqué par une proposition jugée « inacceptable » par les syndicats salariés et ayant conduit à une année blanche.
Et les salariés dans tout ça ?
Sur le terrain, l’enjeu est concret : les minima. « Sur les plus bas salaires, cela a une incidence directe », rappelle l’UNSA, évoquant un ordre de grandeur d’environ 70 euros brut pour le 1er niveau de rémunération, avec un effet mécanique pour tous les salariés sur la prime d’ancienneté (indexée sur le minima). Avec l'opposition du ROF, la branche restera sur la grille antérieure, prévient Frédéric Boulle, nourrissant le risque d’une nouvelle « rupture du dialogue social » après déjà un épisode similaire l’an dernier.
Derrière la bataille de procédures, c’est la question du pouvoir d’achat – et de l’attractivité du secteur – qui revient, une fois encore, au coeur du débat.
Rappellons cependant que ce n'est pas parce que les syndicats ne se sont pas mis d'accord sur une augmentation des minima salariaux que vous ne pouvez pas négocier votre salaire au sein de votre entreprise.
